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LA LATITUDE DES FORMES. ORESME ET SES DISCIPLES

vitesse ; elles le sont aussi à l’accélération que notre auteur nomme velocitatio.

« On pourrait encore, dit-il[1], imaginer une autre succession. En effet, toute vitesse est susceptible de devenir plus intense ou de s’atténuer ; ce par quoi elle devient continuellement plus intense se nomme accélération ; d’ailleurs, cette accélération ou augmentation de la vitesse peut se faire plus vite ou plus lentement ; aussi arrive-t-il parfois que la vitesse croisse en intensité tandis que l’accélération s’atténue, parfois que toutes deux croissent simultanément en intensité, — Adhuc posset ymaginari alia successio ; omnis enim velocitas est intensibilis et remissibilis ; ejus vero continua intensio vocatur velocitatio ; et hec quidem[2] velocitatio seu augmentatio velocitatis potest fieri velocius aut tardius ; unde quandoque contingit quod velocitas intenditur et velocitatio remittitur, quandoque vero utraque intenditur.

« Et semblablement, cette accélération se produit tantôt d’une manière uniforme, tantôt d’une manière difforme, et ceci de diverses façons. — Et similiter hujusmodi velocitatio quandoque fit uniformiter quandogue difformiter, et diversimode. »

Mais laissons l’accélération, au sujet de laquelle Oresme n’insiste pas davantage, et revenons à l’étude de la vitesse.

En une qualité quelconque, aussi bien qu’en un mouvement, Oresme ne se borne pas à considérer l’extension, figurée par la longitude, et 1’intensité, figurée par la latitude ; il étudie, en outre, ce qu’il nomme la quantité totale (quantitas totalis)[3] ou la mesure (mensura). Cette mesure est l’un des principaux sujets de la troisième partie du traité, partie qui a pour titre : De acquisitione et mensura qualitatis et velocitatis.

« D’une manière universelle », dit Oresme[4], « la mesure où le rapport de deux qualités linéaires, ou bien encore de deux vitesses, est égal au rapport des deux figures, comparables entre elles (ad invicem comparatæ), par lesquelles elles sont représentées. Je dis : comparables entre elles, à cause d’une remarque qui a été faite au chapitre septième de la première partie. » Cette remarque, que nous avons analysée en son temps, nous montre ce qu’Oresme entend par figures comparables ; ce sont des figures

  1. Oresme. Op. laud., pars II, cap. V ; De quibusdam alias successionibus in motu ; ms. no 7.371, fol. 238, ro ; ms. no 14.580, fol. 48, col. a.
  2. Le ms. n° 7.371 porte : quedam.
  3. Oresme. Op. laud., pars II, cap. III ; De quantitate velocitatis ; ms. no 7.371, fol. 237, ro ; ms. no 14.580, fol. 47, col. b.
  4. Oresme. Op. laud., pars III, cap. VI ; De mensura qualitatum uniformarum et velocitatum ; ms. no 7.371, fol. 261, ro ; ms. no 14.580, fol. 59, col. a.