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LA PHYSIQUE PARISIENNE AU XIVe SIÈCLE

évident si l’on observe que, dans la blancheur, trois choses sont à considérer : En premier lieu, la nature spécifique. En second lieu, le degré individuel, mais toutefois essentiel, qui est la quiddité de l’individu. En troisième lieu, la différence individuelle par laquelle la blancheur est cette blancheur (hæc). » François de Mayronnes, qui terminait son exposé par où Antonio d’Andrès commence le sien, eût ainsi désigné ces trois choses : La nature spécifique ; le degré individuel composé par l’union de la nature spécifique avec l’hœcceitas ; enfin l’hœcceitas. « La question, poursuit notre auteur, se pourrait entendre des deux sortes de quiddité ; mais nous nous enquerrons seulement de la quiddité prise en la seconde manière, point en la première façon. »

Cela posé, « nous examinerons, en premier lieu, si, dans une forme, il y a des degrés ; en second lieu, quelle en est la nature (quid sint) ; en troisième lieu, quelles en sont les propriétés (quales sint).

» Demande-t-on s’il existe des degrés ? Prouvons que oui. Des sujets divers ne sauraient, en même temps, participer d’une même forme dans des rapports (rationes) différents, si cette forme n’était, en elle-même, compatible avec la diversité de ses rapports. Or il est des formes spécifiques, la blancheur par exemple dont des sujets divers participent selon des rapports différents. Ce sont ces rapports (rationes) que j’appelle des degrés. »

Cette définition semblerait nous conduire à la théorie de saint Thomas. L’auteur ne nous laissera pas poursuivre dans cette voie.

« Demande-t-on maintenant[1] quelle est la nature de ces degrés ? quid sint ? Le degré de forme dont il est ici question est une portion, considérée au point de vue de la perfection (portio perfectionalis) de la forme spécifique. Un tel degré ne se trouve pas compris dans la notion quidditative de cette forme. C’est lui, au contraire, qui, dans la notion par laquelle il est conçu, implique essentiellement la forme spécifique. » Cela est bien clair, puisque le concept de ce degré de forme implique, outre la notion de la forme spécifique, celle de l’hœccéité qui concrétise et l’individualise.

« Nous devons donc déclarer[2] que la forme accidentelle en question possède des degrés ; nous devons dire, en outre, que la faculté naturelle (ratio) par laquelle elle est susceptible de plus ou

  1. Antonio d’Andrès, loc. cit. ; éd. cit., fol. suivant, col. a.
  2. Antonio d’Andrès, loc. cit. De secundo ex prædictis ; éd. cit., fol. cit., col. c.