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LA PHYSIQUE PARISIENNE AU XIVe SIÈCLE

dont les diverses parties ne se meuvent pas aussi rapidement les unes que les autres. Mais, en cet écrit, nous n’avons rien rencontré qui traitât d’une vitesse variable d’un instant à l’autre. Ce n’est pas que ce nouveau sujet fût étranger aux méditations d’Albertutius, car il va nous en entretenir en une de ses questions sur le De Cælo d’Aristote[1].

Cette question est ainsi formulée : « Le mouvement du Ciel, d’orient en occident, est-il régulier ? »

C’est afin d’y répondre qu’Albert de Saxe pose une distinction dont Walter Burley avait déjà fixé les principes[2] et que nous allons reproduire :

« Il faut savoir, » dit-il, « qu’il y a une différence entre le mouvement régulier et le mouvement uniforme. L’uniformité du mouvement est relative aux diverses parties du mobile ; on nomme mouvement uniforme le mouvement dont se meut un mobile, lorsqu’une partie de ce mobile se meut aussi vite que toute autre partie. Si une pierre tombe, bien que son mouvement soit, à la fin, plus rapide qu’au commencement, il est dit cependant uniforme au sens propre du mot, parce qu’une moitié de la pierre descend aussi vite que l’autre moitié.

» On nomme au contraire mouvement difforme un mouvement où une partie se meut plus vite et une autre plus lentement, tel le mouvement d’une roue ; en effet, les parties de cette roue qui sont voisines de l’axe ne se meuvent pas aussi rapidement que celles qui sont voisines de la circonférence, bien que ces diverses parties aient même vitesse de rotation. Il n’est pas contradictoire, que le mouvement d’un corps soit un mouvement difforme et que la rotation (circulatio) de ce corps soit uniforme ; en effet, la vitesse du mouvement dépend d’une chose et la vitesse de rotation

  1. Questiones subtilissime Alberti de Saxonia in libros de celo et mundo. Colopbon : Expliciunt questiones… Impresse autem Venetiis Arte Boneti de locatellis Bergomensis. Impensa vero nobilis viri Octaviani scoti civis modoetiensis, Anno salutis nostre 1492 nono kalendas novembris Ducante inclito principe Augustino barbadico. Lib. II. quæst. XIII. Cette question, ainsi que la question XIV, a été omise dans les éditions des Quæstiones d’Albert de Saxe, Thémon et Buridan que Josse Bade et Conrad Resch ont données à Paris, en 1516 et en 1518. Nous nous sommes assuré que ces deux questions figuraient au texte manuscrit que renferme le Cod. no 14.723 du fonds latin de la Bibliothèque Nationale.
  2. Burleus super octo libros physicorum. Colopbon : Et in hoc finit excellentissimi philosophi Gualterii de Burley anglici in libros octo de physico auditu. Aristo. stragerite (sic) emendata diligentissime. Impressa arte ei diligentia Boneti locatelli bergomensis, sumptibus vero et expensis Nobilis viri Octaviani scoti modoetiensis… Venetiis. Anno salutis nonagesimo primo supra millesimum et quadringentesimum. Quarto nonas decembris. Lib. V, tract. II. cap. II ; 147e fol. (non numéroté), col. b.