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LA LATITUDE DES FORMES AVANT ORESME

En second lieu, le Maître parisien analysera le mode de variation de la vitesse quant à son effet (penes quid tanquam penes effectum) ; il recherchera comment la grandeur de la vitesse se relie à l’espace parcouru par les diverses parties du mobile et au temps employé à les décrire. Ce second chapitre formera un petit traité de Cinématique.

La Dynamique d’Albert de Saxe, comme celle de Bradwardine, se résume en la grande loi péripatéticienne : La vitesse avec laquelle un mobile se meut est proportionnelle au rapport de la puissance à la résistance. Mais en l’admission de cette loi, le Maître de Paris marque moins d’assurance que le Maître d’Oxford ; visiblement, sa confiance a été ébranlée par la discussion de Buridan ; en l’exposé que donne le Tractatus proportionum, divers emprunts sont faits à cette discussion ; ces emprunts sont encore plus nombreux et plus reconnaissables au cours des deux questions[1] qu’Albert de Saxe consacre à la discussion des règles posées par Aristote au VIIe livre de la Physique. Parmi ces emprunts, il en est un que nous retrouvons en ces deux écrits d’Albert de Saxe, et qui mérite une mention particulière ; il concerne la supposition qui explique l’accélération de la chute des graves par un impetus acquisitus.

Mais le chapitre du Tractatus proportionum qui est consacré à la Dynamique ne nous doit pas retenir plus longtemps ici ; ce qui doit solliciter notre attention, c’est le chapitre, consacré à la Cinématique, par lequel l’ouvrage se termine.

Ce chapitre commence par les paroles que voici :

« Nunc restat videre penes quid attendatar velocitas motus tanquam penes effectum ; et primo, de motu locali ; secundo, de motu augmentationis ; tertio, de motu alterationis. »

Ce programme ne nous marque pas seulement les divisions du chapitre que nous nous proposons d’analyser ; il en découvre en même temps toute l’étendue. Formé par la Philosophie péripatéticienne, Albert donne au mot mouvement toute l’ampleur qu’il prend en la Physique d’Aristote ; il ne discourra pas seulement, comme Bradwardine et comme notre Cinématique moderne, du mouvement local, mais encore du mouvement d’augmentation et du mouvement d’altération. Par là, son Tractatus proportionum va devenir le type des traités De tribus motibus. De triplici motu,

  1. Acutissimæ quæstiones super libros de physica auscultatione ab Alberto de Saxonia editæ ; lib. VII, quæst. VII et quæst. VIII.