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LA PHYSIQUE PARISIENNE AU XIVe SIÈCLE

et déterminée par un intérieur et un extérieur ; le corps dont elle esl la surface est, tout entier, à l’intérieur de sa surface ; le corps qui touche superficiellement le précédent tout le long de cette surface est, tout entier, à l’extérieur de cette surface. Mais entre le corps qui est à l’intérieur de la surface et le corps qui est à l’extérieur de cette même surface, il n y a rien que la surface indivisible. Elle existe, cette surface, en tant qu’elle est l’intermédiaire entre les deux corps, et cependant on y distingue un intérieur et un extérieur, qui sont des différences locales.

» Dans une ligne circulaire, qui est indivisible en largeur, on distingue un côté convexe et un côté concave…

» Une chose semblable apparaît d’un point pris au centre d’un cercle ; il termine le rayon qui vient d’un côté, de la droite par exemple, et ne termine pas le rayon qui va vers la gauche…

» Il en est de même de l’instant ; il est à la fois la fin du passé et le commencement du futur ; les rapports que désignent les mots commencement, fin, sont distincts l’un de l’autre.

» Cela est encore évident de l’état instantané (mutatum esse) qui est l’indivisible et le terme du mouvement. Il peut, cependant, établir la continuité entre le mouvement précédent et le mouvement suivant. L’état instantané (mutatum esse) contient donc, en lui-même, ce par quoi il est continuation et terme du mouvement précédent, et ce par quoi il est commencement du mouvement suivant.

» Ainsi donc, en chacun des cinq genres d’indivisibles qui viennent d’être énumérés, on peut distinguer et déterminer les différences que voici : Avant et après, à gauche et à droite, devant et derrière, dessus et dessous. »

La pensée que Bonet emprunte à Gérard d’Odon nous apparaît maintenant bien définie. Tout continu est composé de choses qui sont indivisibles au point de vue de la grandeur ; mais en chacune de ces choses, on peut distinguer deux côtés. C’est par là que ces choses indivisibles, peuvent constituer des grandeurs continues ; il suffit, pour cela, que le second côté de chacun des indivisibles dont une grandeur est composée ne fasse qu’un avec le premier côté de l’indivisible suivant, que le devant de l’un soit identique au derrière de l’autre.

C’est à l’aide de ces principes que Gérard, et Bonet après lui, prétendaient réduire à néant l’argumentation de Duns Scot contre les indivisibles.

Dans ce que nous venons de dire, un point demeure indécis. Dans une longueur finie, Gérard mettait-il un nombre fini d’élé-