Page:Duhem - Le Système du Monde, tome VII.djvu/315

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
308
LA PHYSIQUE PARISIENNE AU XIVe SIÈCLE

licet non contineatur a corpore, sic potest circulare, licet non contineat corpus ; puta si esset idem corpus continuum et sphæricum. Igitur illa forma fluens secundum quam est per se motus circulationis posset per se esse sine respectu tam ad continens quam ad contentum ; et ita est forma mere absoluta. Quære responsionem. »

Parmi les franciscains qui ont subi, durant la première moitié du xive siècle, l’influence de Duns Scot, il en est un qui possède, à un haut degré, l’art de saisir et de mettre en saillie les thèses fondamentales d’une doctrine. Ce franciscain, c’est Nicolas Bonet. Demandons à Nicolas Bonet de nous donner le commentaire des paroles prononcées par le Docteur Subtil.

« Le terme positif du mouvement local, écrit-il[1], est appelé ubi ou bien encore circonscription passive et positive. C’est bien ce que suppose cette définition du mouvement : Le mouvement est l’acte qui, par nature, porte une chose en un certain ubiMotus est actus naturaliter illativus alterius in ubi.

» Mais il y a doute au sujet de la question suivante : Le mouvement peut-il exister et se faire sans qu’aucun terme soit acquis à nouveau, ou bien non ?…

» Il faut bien remarquer que cette proposition : Le mouvement a lieu sans avoir de terme, peut s’entendre de deux manières différentes. On peut entendre qu’il manque absolument de tout terme, ou bien qu’il manque d’un terme produit à nouveau.

» Que le mouvement puisse avoir lieu en manquant absolument de tout terme, nous ne l’admettons pas ; le mouvement, en effet, est une passion successive qui a le mobile pour sujet et le moteur pour terme.

» Mais que le mouvement puisse avoir lieu sans qu’aucun terme se trouve, par lui, produit à nouveau, cela, il faut nécessairement l’admettre. Cela est évident, car si une chose se meut dans le vide elle ne saurait, dans le vide, acquérir aucun ubi nouveau ; là, en effet, il n’y a rien qui entoure cette chose ; il n’y a donc pas de circonscription active et pas davantage cette circonscription passive qui est l’ubi.

» Cela se voit clairement dans le mouvement du premier mobile, de la huitième sphère, qui se meut continuellement sans acquérir aucun nouvel ubi, puisqu’elle n’a rien qui l’entoure,

» Direz-vous que cette sphère acquiert un nouvel ubi en raison

  1. Nicolai Boneti Physica, lib. V, cap. V. Bibl. Nat., fonds latin, ms. no 6678, fol. 151, ro et vo, et fol. 152, ro ; ms. no 16132, fol. 119, coll. b. et c.