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LE LIEU

nion de Jean de Bassols touchant l’immobilité du lieu ; telle est aussi, sur le meme sujet, la proposition essentielle de la doctrine ockamiste.


VI
GUILLAUME D’OCKAM


Guillaume d’Ockam a composé un opuscule, intitulé Tractatus de successivis[1], dont les premières lignes nous font connaître l’objet : « L’opinion commune, y est-il dit, est que le mouvement, le temps et le lieu sont certaines choses distinctes du corps mobile ou du corps logé ; il faut donc voir quelle fut, à ce sujet, l’intention d’Aristote et du Commentateur. »

Présenté modestement comme une simple explication des propos d’Aristote et d’Averroès, cet opuscule émet, au sujet du mouvement, du temps et du lieu, les vues les plus originales et les plus profondes.

Le Tractatus de successivis, qui est un chef-d’œuvre, n’a jamais, croyons-nous été imprimé. Mais la seconde partie de ce traité, telle qui expose la théorie du lieu, a été reprise par Ockam, avec des variantes insignifiantes, en ses Summulæ Physicorum, et par deux fois, s’est trouvée imprimée avec ces Summulæ[2].

La théorie ockamiste du lieu a de très grandes analogies avec la théorie scotiste ; de cetle dernière, elle conserve les doctrines essentielles ; toutefois, entre les deux théories se marquent des divergences qu’il importe de signaler.

Tout d’abord, Ockam se sépare nettement de Duns Scot au sujet de la nature même du lieu.

Pour le docteur Subtil, le lieu est une certaine entité dont le fondement se trouve en la surface de contact du contenant et du

  1. Bibliothèque Nationale, fonds latin, ms. no 16130 (ancien fonds Sorbonne, ms. no 916) : fol. col. b, inc : Quia communia opinio est quod motus, tempus et locus sunt quedam res alie a mobili et locato… Fol. 140, col. c : … et sic contingit successive verificari cantradictoria, Explicit tractatus de successivis editus a Guillelmo Ocham. Une autre main, du xive siècle a ajouté : Okame siècle.
  2. Au ms. cité, cette partie commence, au fol. 134, col. d, dans les termes suivants : Consequenter videndum de loco quod Philosophus 4 Physicorum diffinit sic : Locus est ultimum corporis continentis contigui immobile. — Elle finit ainsi, au fol. 137, col. d : Et hec dicta de loco et ejus definitione sufficiant gratia veritatis, et que modo minus diffuse dicta sunt, alias, si necesse fuerit, diffusius tractabuntur. Elle forme les chapitres XX, XXI et XXII de la quatrième partie des Summulæ Physicorum.