Comme on le croyait volontiers, de son temps, à l’Université de Paris, Grazadei pense que Dieu pourrait créer une grandeur actuellement infinie ; il pense, en outre, que cette opinion est conforme à celle de Saint Thomas d’Aquin.
« À cette question : Dieu peut-il créer une grandeur actuellement infinie ? Je n’entends répondre qu’en conformité avec ce que Saint Thomas aurait, je crois, soutenu[1]. Si quelqu’un pouvait montrer que le sentiment de Saint Thomas a été contraire à ce que je vais dire, je suis prêt à le rétracter en entier. En effet, dans sa question disputée sur l’infini, Thomas disait : Si l’existence actuelle de l’infini n’est pas contraire à la nature des choses et n’implique pas contradiction, je dis qu’à mon avis, Dieu peut faire un tel infini. À la vérité, il ne déclare pas que cette existence actuelle de l’infini n’est pas contraire à la nature des choses ; mais il me semble que cela n’est pas difficile à voir, »
Grazadei s’applique donc à prouver que l’existence actuelle d’une grandeur infinie est exempte de toute contradiction, tant externe qu’interne ; il en conclut que Dieu pourrait créer une telle grandeur infinie et il croit, en formulant cette conclusion, qu’il suit fini eut ion thomiste. Assurément, il a méconnu cette intention.
Saint Thomas d’Aquin a éprouvé des velléités d’accorder à Dieu le pouvoir de produire une multitude infinie en acte, de créer une grandeur qui fût, infinie au moins en puissance ; mais ce ne furent que des velléités promptement réprimées par la tyrannique autorité du Péripatétisme.
Dans une de ses discussions quodlibétiques, Thomas maintient[2] que Dieu peut créer tout ce qui n’implique pas contradiction, et donc un infini actuel si l’existence d’un tel infini n’est pas contradictoire. « Mais le Commentateur, au sixième commentaire sur le cinquième livre de la Métaphysique, dit que ni l’infmi par soi, ni l’infini par accident ne peut exister en acte ; en puissance, on trouve l’infini par accident, mais non pas l’infini par soi ; selon Averroès, donc, l’infinité répugne absolument à toute chose à quoi il appartient d’exister d’une manière actuelle ; et ce parti semble plus vrai que le parti contraire (Et sic, secundum eum, esse infinitum omnino repugnat ei quod est esse in actu ; et hoc verius esse videtur).