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LA PHYSIQUE PARISIENNE AU XIVe SIÈCLE

l’air, de l’eau et de la terre ; passant enfin aux corps célestes, il examine successivement les questions suivantes[1] :

I. queritur de loco celi et primo queritur an celum habeas locum.

II. queritur ergo utrum celum habeat locum per se vel per accidens.

III. Habito quod celum habeat locam per accidens, queritur quomodo istud per accidens habeal reduci ad per se.

IV. queritur utrum celum habeat aliquo modo locum in quo.

V. queritur ergo de toto universo utrum habeat locum.

VI. queritur de orbibus planetarum et de loco istorum orbium, an habeant locum per se vel per accidens, scilicel planete.

« Tout corps mobile de mouvement local possède nécessairement un lieu[2] ; or le ciel est mobile de la sorte ; le ciel a donc un lieu. »

Seulement, ce lieu du ciel ne sera pas un lieu proprement dit (per se) ; ce sera seulement un lieu par accident[3]. Un corps qui, de soi (per se), se meut de mouvement local rectiligne, a besoin d’un lieu proprement dit ; mais il n’en est pas de même d’un corps qui se meut seulement de mouvement local circulaire ; un tel corps peut se contenter d’un lieu par accident. Entre ces mobiles, en effet, il y a une grande différence ; le corps mobile de mouvement rectiligne va d’un lieu à un autre ; au contraire, le mobile animé de mouvement de rotation ne change pas de lieu ; c’est pourquoi, comme nous l’allons voir, il n’a pas besoin d’un lieu proprement dit.

Étant admis que le ciel n’a pas de lieu proprement dit, qu’il est seulement en un lieu par accident, il reste à préciser cette affirmation et à dire comment le ciel est logé par accident ; c’est à quoi Bacon consacre sa troisième question.

Il examine successivement trois théories, en commençant par celle qui lui plaît le moins pour finir par celle qu’il croit la meilleure.

La théorie qu’il présente tout d’abord[4], et donc qu’il répute la moins satisfaisante, c’est celle de Thémistius : Le ciel est en un lieu par accident en ce que ses diverses parties ont un lieu proprement dit (per se).

  1. Bibliothèque municipale d’Amiens, ms. no 406, fol. 46, col. d, à fol. 47, col. b.
  2. Quæst. I ; ms. cit., fol. 46, col. d.
  3. Quæst. II ; ms. cit., loc. cit.
  4. Roger Bacon, loc. cit. ; ms. cit., fol. 46, col. d.