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CHAPITRE III
LE LIEU

Première partie. — La théorie du lieu, au Moyen-Âge,
avant les condamnations de 1277.
I
LA THÉORIE DU LIEU CHEZ LES ARABES

La théorie péripatéticienne du lieu reposait sur deux propositions essentielles :

Selon la première, le lieu d’un corps doit contenir ce corps ;

Selon la seconde, le lieu d’un corps doit être une chose immobile, car c’est le terme fixe auquel est rapporté tout mouvement local du corps.

Or, dans l’ensemble de la Physique péripatéticienne, ces deux propositions étaient condamnées à ne se pouvoir concilier.

En vertu de la première proposition, en effet, la dernière des sphères célestes ne saurait avoir de lieu, puisque rien ne la contient.

Dénuée de lieu, elle devrait, en vertu de la seconde proposition, être incapable de mouvement local, puisque tout mouvement local requiert un lieu, c’est-à-dire un terme fixe auquel il soit rapporté.

Or, dans le système péripatéticien, la sphère suprême n’est pas seulement capable de mouvement local ; elle se meut vraiment, puisque le mouvement diurne est le sien.

Voilà donc une contradiction que toutes les Physiques péripatéticiennes s’efforceront de résoudre.

L’histoire des solutions proposées se partage, d’ailleurs, en deux périodes dont les caractères sont bien distincts.

Jusqu’en 1277, on procède par retouches apportées au système