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LA PHYSIQUE PARISIENNE AU XIVe SIÈCLE

licien, rien, en particulier qui ressemble à ce qu’Holkot lui attribue.

Des deux réponses que notre auteur vient de rapporter, la première est celle qui avait la faveur de François de Mayronnes, la seconde est celle qui plaisait à Jean de Bassols. Entre les deux, Holkot n’a déclaré aucune préférence ; il semble bien, cependant, pencher vers la première opinion.

Voici, en effet, une circonstance où il s’exprime comme l’eût fait Mayronnes :

« La sixième objection dit : S’il existait une infinité d’âmes Dieu ne pourrait créer un nombre d’âmes plus grand (plures). J’accorde cette proposition, mais en la prenant au pied de la lettre (de virtute vocis) ; Dieu ne pourrait pas créer un plus grand nombre de choses (plures res) qu’il n’en a créé ; mais il peut créer d’autres âmes, lors même qu’il en existerait déjà une infinité. »

Puis, tout aussitôt, nous l’entendons contredire au langage qu’eût tenu Bassols. À la possibilité de l’infini actuel, en effet, on peut faire cette objection bien connue : Il en résulterait qu’une partie ne serait pas forcément inférieure au tout. Cette proposition, Holkot ne fait point de difficulté de l’accorder ; il la trouve manifeste lorsque l’on compare que l’on a prolongé à l’infini seulement dans un sens à une autre droite qui s étend à l’infini dans les deux sens. Or Bassols déclarait la première droite moindre que la seconde.

Les raisonnements développés par Robert Holkot ont peut-être préparé ceux que développera Grégoire de Rimini. En outre celui-ci trouvera, au sein même de son ordre, une influence qui le poussera à admettre la possibilité de l’infini catégorique ; cette opinion sera tenue, en effet, par le prieur général des Ermites de Saint Augustin, par Thomas de Strasbourg.

Thomas, qui était allemand d’origine, avait pris la robe des Ermites au couvent de Strasbourg et commencé, dans ce couvent, des études qu’il acheva à Paris, selon l’usage de ce temps. En 1345, le chapitre général de l’ordre, tenu à Paris, l’éleva au généralat à la place de Denys de Modène. Il présida trois autres chapitres généraux, tenus à Pavie en 1348, à Bâle en 1351, et à Pérouse en 1354. Il mourut en 1357, à Vienne (Isère) ; en cette même année 1357, le chapitre général de Montpellier lui donna Grégoire de Rimini pour successeur.

De Thomas de Strasbourg, on possède un volumineux commentaire aux Sentences de Pierre Lombard, commentaire qui a été