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L’ÉCLECTISME PARISIEN

les conclusions de la Géométrie seraient fausses. Cette conclusion-ci, en elfet, serait fausse : Toute ligne peut être divisée en parties égales ; car une ligne composée de parties indivisibles ne pourrait toujours être divisée de la sorte ; partant, toutes les conclusions qui suivent celles-là et qui en dépendent seraient fausses ou douteuses. Bien plus ! La première conclusion de la Géométrie est fausse et, par conséquent, il en est de même des autres ; les géomètres supposent, en elfet, qu’en tout cercle, toutes les lignes menées du centre à la circonférence sont égales entre elles ; par là, ils admettent que tout cercle i un centre qtti est vraiment le milieu du cercle par suite de son équidistance à la circonférence ; or cela serait faux si une ligne se composait d’indivisibles ; qu’ils prennent, en effet, un cercle dont le diamètre soit composé de quatre points ; aucun de ces points ne serait un semblable milieu. Ainsi tous les principes admis eu Mathématiques et toutes les conclusions qui y sont prouvées supposent cette proposition douteuse que le corps n’est pas composé d’indivisibles ; cette proposition n’est connue que par le moyen d’une autre science.

» De là je déduis, à titre de corollaire, cette troisième conclusion : La Mathématique n’est pas la plus certaine de toutes les sciences ; il faut, en effet, que les principes des démonstrations soient mieux connus, plus certains, plus dignes de confiance que tes conclusions ; or les principes des Mathématiques sont des conclusions qui doivent être éclaircies et prouvées en une autre science ; il faut donc que cette autre science soit plus certaine que les Mathématiques ; c’est pourquoi Aristote, au préambule de la Métaphysique, prouve que la science qui, d’une manière absolue, est la plus certaine, ce n’est pas la Mathématique, mais la Métaphysique.

» Mais alors, pourquoi le Commentateur dit-il que les démonstrations mathématiques occupent le premier rang dans l’ordre de la certitude ? Pourquoi tous proclament-ils que la Mathématique est la plus certaine de toutes les sciences ? Je réponds que cela n’est pas vrai d’une manière absolue. Si l’on parle ainsi, c’est qu’une fois admis les principes des Mathématiques, la méthode suivie pour démontrer les conclusions mathématiques à partir de ccs principes est la plus certaine et la plus ordonnée qui soit. Mais si nous voulons connaître parfaitement une conclusion mathématique, il nous faut connaître parfaitement les prémisses par le moyen desquelles elle est établie, et cela en remontant jusqu’aux premiers principes mathématiques ; et si, à son tour, un de ces