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LA RÉACTION DE LA SCOLASTIQUE LATINE

» De ces ordres tous regardent en haut, et tous, vers le bas, exercent leur puissance, en sorte que vers Dieu, tous sont tirés et fous tirent.

» Et De n y s avec un si grand désir s’est mis à contempler ces ordres qu’il les a nommés et distingués comme je fais. »

Déjà, au huitième chant du Paradis, Dante avait fait une allusion à cette théorie des moteurs célestes ; déjà, il avait aperçu ces cercles de feu ; déjà il avait vu des lumières venir à lui « en quittant la ronde qui a commencé, tout d’abord, dans les hauts Séraphins ». Il a entendu une de ces lumières lui parler en ces termes : « Dans un même cercle, d’une même révolution et d’un même désir, nous tournons avec les princes célestes à qui tu as dit autrefois, lorsque tu étais dans le monde : Vous qui, en comprenant, mouvez le troisième ciel. »

« Toi che intendendo il terzo ciel movete » ; par ce vers débute la Canzone qui, au deuxième traité du Convito, fournit son thème. Dante lui-même nous invite donc à recourir à cet écrit plus ancien pour commenter ce qu’il a dit, au Paradis, des intelligences célestes.

Or, nous dit-il[1], ce premier vers nous apprend « qu’il a l’intention de parler de certaines intelligences, ou de certains anges, pour nous exprimer d’une manière plus usitée, qui sont préposés à la révolution du ciel de Vénus à titre de moteurs de ce ciel ».

Après avoir montré comment est disposé ce troisième ciel, Alighieri poursuit[2] : « Il nous reste à démontrer quelles sont les causes qui le meuvent. 11 est donc à savoir premièrement que les moteurs de ce ciel sont des substances séparées de la matière ou intelligences que la gent vulgaire nomme des anges.

Au sujet de ces créatures, aussi bien que des cieux, les divers philosophes ont eu des sentiments divers, bien que la vérité soit maintenant trouvée (avvegnachè la verità sia trovata). »

Aristote a pensé que ces intelligences séparées de la matière étaient en même nombre exactement que les mouvements divers des orbes célestes ; Platon les a crues beaucoup plus nombreuses, car il y a joint autant d’idées qu’il y a d’espèces en ce inonde. « Mais bien que les susdites opinions [des philosophes païens au sujet de ces intelligences] leur eussent été fournies par la raison humaine et par une expérience qui avait son poids, ils n’ont pas encore vu la vérité à la fois par défaut de raisonnement et par

1. Il Convilo di Dante Alighieri, trntlalû seconde, cap. Il (Dante Aughîehi, Opéré minori t. JU, Firenze, 1878 ; p. n3).

2. Dante ÀLiGHieiu, Opr laud t Ira U* secondo, cap. V ; pp, 11g izS.

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