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LES DEUX VÉRITÉS. RAYMOND LULL ET JEAN DE JANDUN

losophie de ce maître était, depuis longtemps, tombée dans l’oubli ; de tous ses ouvrages, en la ville même qui les avait vu composer, un seul fut imprimé, et une seule fois ; les Questions sur la Physique, en effet, furent éditées à Paris, en 1506, par Nicolas Després.

De l’encyclopédie rédigée par Jean de Jandun, peut-on classer et dater les diverses pièces ? Cela parait malheureusement impossible. Nous ne possédons, pour nous y aider, qu’une seule indication précise. Jean de Jandun avait composé deux Sophismata de sensu agente qui sont demeurés inédits ; en l’exemplaire manuscrit[1] qui nous les a conservées la première de ces deux dissertations se termine par ces mots : Explicit sophisma de sensu agente, ordinatum a magistro Johanne de Genduno, anno domini MoCCCoXo. Or, en ses Questions sur les livres de l’âme, notre auteur mentionne[2] « les deux traités sur le sens actif qu’il a mis en ordre ». Les Questions sur les livres de l’âme sont donc postérieures à 1310. Il semble qu’en plaçant entre les deux dates de 1310 et de 1320 la rédaction de l’encyclopédie de Jean de Jandun, on ne s’écarterait guère de la vérité[3].

III

La Doctrine de Jean de Jandun

A. Jean de Jandun et l’autorité du Péripatétisme.

Jean de Jandun est un fervent admirateur de la Philosophie. La Philosophie, en effet, comme l’intelligence active en qui elle réside, est éternelle et subsiste perpétuellement en sa plénitude. « Le Commentateur enseigne[4] que la Philosophie subsiste toujours parfaite en la majeure partie de son sujet, c’est-à-dire en la majeure partie des hommes ; Il n’entend pas par là que, de

  1. Bibliothèque nationale, fonds latin, no 16089, followers. 160-166, Cf. Noël Valois, Op. laud., p. 545.
  2. Ioannis de Ianduno viri acutissirni Super libros Aristotelis de anima Subtilissimæ Quæstiones, Venetiis apud Iuntas MDLII. Lib. II, quæst. XVI, fol. 3a, col. b.
  3. En ces écrits, Thomas d’Aquin est nommé tantôt frater Thomas et tantôt Sanctus Thomas ; cette désignation en reporterait la rédaction après 1323, date de la canonisation du saint ; mais il est vraisemblable que le mot sanctus a été substitué à frater par les copistes.
  4. Joannis de Janduno Op. laud., Lib. III, quæst. XXIX. Ed. cit., fol. 93, col. d, et fol. 94, col. a.