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LE REFLUX DE L’ARISTOTÉLISME

D’autres questions du même genre, mais anonymes, remplissent encore quatre feuillets et demi.

Pierre d’Auvergne est un des maîtres bien connus de la fin du xiiie siècle. Fidèle disciple de Saint Thomas d’Aquin, il acheva le commentaire au De Cælo d’Aristote que le Doctor communis n’avait rédigé qu’à moitié.

Le Magister Utricus[1] dont nous venons de relever le nom est, très vraisemblablement, Ulrich de Strasbourg. Les deux premières questions qu’il discute sont les suivantes : Dans les êtres séparés de la matière, y a-t-il genre et différence ?

Les dimensions indéterminées précèdent-elles nécessairement la forme substantielle au sein de la matière ?

Sur ccs deux points, les doctrines soutenues sont très nettement thomistes, comme nous pouvions le supposer d’Ulrich de Strasbourg. Nous ne sommes pas étonnés non plus, lisant les questions que ce maître examine au sujet de la Géographie, de voir le nom d’Albert le Grand cité[2] en une question sur la Mer Ronge et en une autre question sur la Mer Morte.

Jean Vate, enfin, est un contemporain d’Henri de Bruxelles. Avec celui-ci et, comme lui, simple maître ès-arts, il assiste[3], au mois d’août 1289, à l’assemblée de Docteurs devant qui le cardinal Jean Cholet prit l’engagement de fonder une chapelle en réparation de violences commises par ses gens à l’égard de quelques écoliers. L’année suivante, le 6 août, étant recteur de l’Université de Paris[4], il dénonçait vivement au pape de graves abus imputés au chancelier Bertaut de Saint-Denys.

Parmi les nombreuses questions de quolibet que nous avons sous les yeux, toutes celles qui ne sont pas anonymes portent le nom d un maître enseignant à la Faculté des Arts vers la fin du xiiie siècle ; Henri de Bruxelles, Henri l’Allemand, Jean Vate, Ulrich de Strasbourg, Pierre d’Auvergne ; celles dont les auteurs nous demeurent inconnus sont, très probablement, de la même époque. En les lisant, nous aurons quelque idée des sujets qui attiraient particulièrement l’attention des artistes parisiens à cette époque.

  1. B. Hauréau qui, au lieu de Ulrici, a lu Verici, confusion fort excusable d’ailleurs, écrit (Op. laud., p. 222) : Ce docteur est-il un français du nom de Guerric ? Cela paraît peu vraisemblable ; rien, du moins, ne favorise cette conjecture.
  2. Ms. cit., fol. 76, col. a.
  3. Denifle et Châtelain, Chartularium Universitatiss Parisiensis, t. II, sect. I, p. 35.
  4. Ibid., p. 43.