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LE REFLUX DE L’ARISTOTÉLISME

Qu’était l’activité intellectuelle de la Faculté des Arts au moment où va paraître Jean de Jandun, c’est-à-dire à xiiie siècle et durant les premières années du xive siècle ? Nous ne possédons, à ce sujet, que de bien maigres renseignements. Presque tout ce que nous savons est contenu dans une collection de pièces que conserve un manuscrit de la Bibliothèque Nationale[1]. Si cette collection nous présente une image fidèle des discussions qui agitaient la Faculté des Arts au moment dont nous parlons, force nous est d’avouer que ces discussions étaient encore de fort étroite envergure.

Ce recueil contient une foule de courtes questions, débattues dans la Faculté des Arts, et déterminées par le maître qui présidait à la discussion ; ce que nous avons sous les yeux, c’est évidemment le résumé de cette détermination.

De ces questions, un grand nombre sont anonymes ; telle la première série que nous offre le recueil que nous feuilletons[2]. La plupart’de ces questions sont des exercices de Logique, des solutions de sophismes. C’était un exercice que les constitutions de Robert de Courçon imposaient à ceux qui voulaient être gradés dans la Faculté des Arts. Cet exercice y avait bientôt conquis une grande faveur. Cette faveur était même telle que le nom de Sophisma avait fini par être donné à tout écrit de peu d’étendue où une question philosophique était discutée, alors même que cette discussion n’avait rien d’un exercice de Logique et qu’elle n’avait aucunement pour but de délier un sophisme. Par exemple, le manuscrit que nous lisons contient un court traité de Jean de Jandun sur le sens actif ; or l’explicit donne[3] à ce traité le titre de Sophisma de sensu agente.

Les questions anonymes dont nous venons de parler ne contiennent qu’une indication propre à les dater ; on y cite[4] frater Thomas ; elles sont donc antérieures à la canonisation de Thomas d’Aquin (1323).

Elles sont suivies de onze autres questions[5] que termine cette indication :

  1. Bibliothèque Nationale, fonds latin, no 16089. — B. Hauréau, Notice sur le numéro 16089 des manuscrits latins de la Bibliothèque Nationale (Notices et extraits des Manuscrits de la Bibliothèque Nationale, t. XXXV, 1re partie, 1896, p, 209).
  2. Ms. cit., fol. 51, col. a à fol. 53, col. c. — B. Hauréau, Op. laud., p. 213.
  3. Ms. cit., fol. 166, ro.
  4. Ms. cit., fol. 5i, col. d.
  5. Ms. cit., fol. 54, col. a, à fol. 61, col. d. — B. Hauréau,Op. laud., pp. 213-217.