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LE REFLUX DE L’ARISTOTÉLISME

ne diffèrent pas. Ainsi donc, celui qui donne aux objections une réponse suffisante paraît bien démontrer sa proposition.

» À cela nous répondrons que celui qui résout parfaitement les objections montre que sa proposition n’implique aucune des répugnances dont on l’a accusée ; mais il ne démontre pas qu’on ne lui saurait objecter aucune répugnance, ni qu’elle n’en peut impliquer quelqu’une qui nous demeure cachée.

» Je dis donc que, bien qu’une vérité de foi ne puisse être démontrée par nous d’une manière évidente, nous la pouvons cependant défendre d’une manière suffisante. »

Encore que ces principes logiques soient tout élémentaires, il pouvait être bon de les rappeler avec cette clarté et cette fermeté à des scolastiques que l’abus des disputes, menées par la méthode du sic et non, pouvait induire à les méconnaître.

D’après ces principes, le chrétien pourra défendre d’une manière suffisante le dogme de la création. Pour lui montrer comment il y pourra réussir, François de Meyronnes dissipe[1], l’une après l’autre, vingt difficultés opposées à cette vérité : Dieu a pu, sans éprouver lui-même aucun changement, créer quelque chose de nouveau. Puis il résout[2] vingt objections élevées contre cette autre proposition : Dieu peut produire quelque chose à partir du pur non-être.

Mais, « étant admis, par ce qui vient d’être dit, que le dogme de la création peut être défendu contre les infidèles, » notre auteur aborde l’examen de cette seconde question[3] : « Contre ces mêmes infidèles, ce dogme peut-il être démontré ? »

François connaît « un certain docteur » qui a cru que ce dogme se pouvait prouver avec évidence, et cela de la manière suivante :

« Tout ce qui n’est pas, de soi, impossible, au premier sens des mots impossible de soi, peut être fait par un agent de puissance infinie ; mais qu’une créature soit faite de rien, ce n’est pas impossible de soi, au premier sens du mot. Donc cela est au pouvoir de Dieu… Par impossibilité au premier sens, ce docteur entend une impossibilité semblable à celle qu’il y aurait, pour un homme, à ne pas être animal, » c’est-à-dire l’absurdité.

Mais ce raisonnement ne satisfait point François de Meyron-

1. François de Meyronnes, /oc. c « 7.t pars I, difficile 1 ; éd.cit., fol. 2^5, col. a, à foL coL a.

2. François de Meyronnes, /oc. pars I, difficile II ; éd. cil », fol, 2/jô, col. a, à coll. d.

3. François de Meyronnes, loc. cil.t pars II ; éd. ciL, fol. 2^6, coL <L

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