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DUNS SCOT ET LE SCOTISME

principales, a non seulement pu exister de toute éternité, mais encore qu’il a, en fait, été de toute éternité.

» La seconde opinion est que le Monde n’a pas existé et n’a pas pu exister de toute éternité.

» La troisième est que ni le Monde ni aucune créature n’a existé de toute éternité, mais que le Monde aurait pu, cependant, exister de toute éternité…

» Au sujet de la première réponse, quelle qu’ait été la pensée de Platon, on peut dire que l’intention d’Aristote, du Commentateur, d’Avicenne etd’Al-Gazel a été la. suivaute : Les parties principales du Monde sont éternelles, savoir : les intelligences, le ciel, la matière première, tes espèces de l’Univers soumis à la génération et à la corruption (je ne dis pas les individus qui composent ces espèces), le mouvement et le temps ; une multitude de créatures, donc, sont, de fait, éternelles ». Jean de Bassols énumère alors les arguments des philosophes en faveur de cette doctrine. Il ajoute[1] : « D’autres prétendent qu Aristote n’a pas cru qu’il avait démontré l’éternité du Monde. » 11 reproduit, à ce sujet, les observations de Moïse Maïmonide ; puis il formule la conclusion qu’il va s’efforcer de justifier : « Je dis donc qu’on ne saurait prouver d’une manière démonstrative ni la nouveauté ni l’éternité du Monde. Mais je dis que la vérité se tire de la foi et de l’Écriture… Je conclus, par conséquent, que si Aristote a cru qu’il avait démontré l’éternité du Monde, il a été honteusement déçu et a grandement erré. Je dis de même que ceux qui se flattent de démontrer la nouveauté du Monde en prouvant que le Monde ne peut pas avoir existé de toute éternité, se déçoivent et ne démontrent rien, comme on l’établira plus loin. » Bien entendu, c’est surtout l’argumentation d’Henri de Gand qui se trouve battue en brèche en la seconde partie de cette minutieuse déduction ; l’influence de Gilles de Rome s’y laisse souvent reconnaître.

L’esprit qui a dirigé Jean de Bassols en l’examen de ce célèbre problème de l’éternité du Monde pouvait déjà se reconnaître en ce qu’il avait écrit d’une autre question[2] intimement liée à celle-là : Dieu est-il la cause efficiente de tous les êtres qui existent réellement hors de lui ?

Bassols rencontre, tout d’abord[3], l’opinion d’un certain docteur (c’est d’Henri de Gand qu’il veut parler). Ce docteur prétend

1, Jean de Bassols, /oc ?. cz’Z., foL XV, coll* c et d.

2. Joannis de Bassolis Od. faud.f Lib. Il, Disl, I, quæst. I, fol. II, col. à fol. VII, col. a.

3. Jean de Bassols, loc. cit.,

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