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BASSOLS REVIENT À AVERROÈS

Scot l’avait reconnu avant Jean de Bassols ; mais le Docteur Subtil tenait peu de compte des doctrines du Péripatétisme, lorsque celles-ci se trouvaient en contradiction avec les enseignements des théologiens ; or les théologiens déclaraient que les cieux et les éléments étaient sortis d’un même chaos, qu’ils avaient donc été formés aux dépens d’une même matière première ; Scot acceptait cette conclusion sans plus de souci de celle que pouvait fournir la philosophie d’Aristote. Jean de Bassols fit précisément le contraire ; il garda la doctrine qui pouvait s’autoriser du Péripatétisme et délaissa celle des théologiens.

De là cette conséquence : Le disciple favori de Scot, celui que nous avons vu abonder dans le sens du maître au point de forcer ce sens, de traiter comme réelles les distinctions purement logiques que le Docteur Subtil avait pratiquées, celui-là même en vient à délaisser complètement la doctrine de son maître touchant la matière universelle, la materia primo prima ; au sujet de la constitution de la substance céleste, il en vient à rivaliser avec ceux que l’on tenait pour averroïstes, que dis-je ? à les dépasser.

Pierre Auriol, qui avait très minutieusement analysé l’enseignement d’Averroès, soutenait, comme le Commentateur, qu’il n y a pas de matière au ciel, que le corps du ciel est un sujet simple ; mais il n’assimilait pas ce sujet simple à une forme ; il voulait qu’il jouât plutôt, à l’égard de l’âme du ciel, le rôle de matière.

Seul, Godefroid de Fontaines avait admis, avant Jean de Bassols, que le corps du ciel est forme pure. Mais ceux mêmes que l’on met habituellement au nombre des Averroïstes n’allaient pas aussi loin.

Vers le temps où Jean de Bassols enseignait les sentences, Jean de Jandun, nous le verrons, commentait, à Paris, les écrits d’Aristote ; il les interprétait, le plus souvent, dans le même sens qu’Averroès. Le Sermo de substantia orbis, composé par le philosophe de Cordouc, fut, pour Jandun, l’occasion de deux sortes décrits : un commentaire et des questions ; commentaire et questions eurent, d’ailleurs, une vogue très grande et très durable[1].

  1. La première édition de cet ouvrage paraît être la suivante :

    Ioannis de Ianduno Expositio super libro de substantia orbis. Item Questiones super eodem libro. Vinceatiæ impensa ingenioque Henrici de Sancto Viso (sans date) (Hain, Repertorium bibliographicum, no 7464).

    Vient ensuite l’édition que voici :

    Gaietani de Thienis Questiones de sensu agente, de sensibilibus communibus et de Intellectu. — Ioannis de Ianduno expositio libri de substantia orbis. Colophon : Subtilissimis ac difficillimis questionibus in librum commentatoris de substantia orbis a solertissimo. — Ioanne de Ianduno compilatis : Deo optimo maximo favente — finis impositus est ; Impensa ingenioque Antonii