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DUNS SCOT ET LE SCOTISME

sées au moyen des formes élémentaires, requièrent d’une manière nécessaire l’adjonction d’une autre chose qui les complète et qui en soit l’acte. Ces actes-là sont les âmes, conséquences intrinsèques des autres formes complexes qui constituent la chair, comme la forme des nerfs, la forme des os et autres semblables…

» Il est maintenant évident que la matière ne saurait être mise en acte, d’une manière immédiate, si ce n’est par les formes élémentaires et simples opposées entre elles, ou par les formes intermédiaires composées à l’aide des formes simples. Elle peut, en outre, être mise en acte, d’une façon médiate, par des âmes qui sont les conséquences nécessaires et intrinsèques de certaines formes intermédiaires, constituées à l’aide des formes élémentaires. Je ne parle ici que des formes substantielles ; la matière, en effet, ne peut recevoir les formes accidentelles que par 1 intermédiaire des formes substantielles, et elle ne peut recevoir de formes accidentelles autres que celles qui sont requises par les formes substantielles. »

Nous venons de passer en revue les diverses catégories de formes dont la matière première est capable. Mais à cette puissance passive de la matière première doit correspondre exactement, dans la nature, une puissance active capable d’amener à l’acte cette puissance passive ; cette puissance active, nous l’avons dit, c’est le corps du ciel.

« Il est assuré que toutes ces formes [dont la matière est capable] en peuvent être tirées par uu certain agent universel. L’agent, en effet, qui a pouvoir de produire les extrêmes, a aussi pouvoir de produire les intermédiaires. Par la force du ciel, donc, la matière peut être amenée aux formes élémentaires, puis à toutes les formes intermédiaires qui sont eu deçà de la vie, enfin à la vie même ; en effet, ce qui produit quelque chose produit aussi, d’une manière necessaire, ce qui résulte nécessairement de cette chose.

» Ainsi, tout cet ordre de formes et d’actes qui sont du genre des formes et des actes pour lesquels la substance de la matière est purement en puissance, le ciel peut y amener la matière ; pour quelques-uns de ces actes, toutefois, il requiert la coopération d’un agent secondaire, de même espèce que la forme à produire ; c’est ce qui a lieu pour les êtres qui se propagent par génération.

» A priori donc, aussi bien que par l’expérience, il est évident que la matière peut être amenée par les agents naturels a tout acte dont elle est capable ; il est évident que l’agent premier de