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DUNS SCOT ET LE SCOTISME

lui appartient. » Cet enseignement est conforme de tout point à celui qu’Henri de Gand a inauguré et que Richard de Middleton a répété.

Conséquent avec le principe qu’il a posé, Duns Scot ne mettra pas en l’homme plus de formes substantielles qu’il n’est nécessaire ; il a été contraint de distinguer la corporéité de l’âme intelligente, il n’introduira pas[1], comme les platoniciens, une àme végétative et une âme sensitive à titre de formes substantielles particulières ; comme Thomas d’Aquin, il admettra que ces deux âmes imparfaites sont virtuellement impliquées en l’âme intelligente plus parfaite. « C’est, en effet, un principe général que si un effet peut être aussi bien produit par peu de causes que par beaucoup, on ne doit aucunement admettre cette multiplicité d explications. Generale principium est quod si aliquid potest œque bene fieri per pauciora sicut per plura, nullo modo talis plural il as debet pont. » Ici encore, il suit fidèlement l’exemple d’Henri de Gand.

Nous arrivons maintenant à ce qu’il y a, peut-être, de plus caractéristique en la Métaphysique de Duns Scot, à la théorie du principe d’individuation ; encore que certaines pensées de Saint Bonaventure ou de Roger Bacon aient pu suggérer telle ou telle proposition de cette théorie, elle n’en constitue pas moins, en son essence, une doctrine singulièrement originale[2].

Contre Averroès et Saint Thomas d’Aquin, et surtout contre leurs partisans plus modernes Godefroid de Fontaines et Gilles de Rome, Duns Scot établit avec grand soin[3] que la matière, étendue et divisible suivant trois dimensions, ne saurait être la cause de la répartition d’une même forme en des individus divers ; ce principe qu’admettaient, avec des nuances, tous les tenants du Péripatétisme ou du Néoplatonisme, il le rejette absolument pour lui substituer un principe tout différent.

genre très général, le genre subordonné, l’espèce, correspond une certaine unité[4] ; le genre a l’unité générique parce qu’il ne peut

1. Johankis Duns Scoti Quæstiones disputais de rerum principio, quæst, XI, art. II.

2. C’est surtout au sujet de cette doctrine qu’il convient de consulter I ouvrage cité au début de ce § t P. Parthenius Minges, Der angebltcfte Dealismus des Duns Scotus.

3. Joannis Duns Scoti Scriptum Osconiense, Lib. Il, Dist. III, quæst, IV etV.

4. JoANNis Duns Scoti Scriptum (kconiense, Lib. II, Dist. III, quæst, VI.

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