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L’ACTUALITÉ DE LA MATIÈRE

matière était néant, si elle n’était pas un être, l’être dériverait du néant et du non-être, ce qui est impossible.

» Cette matière demeure la même sous des déterminations opposées, sous des puissances numériquement différentes qui se corrompent et s’engendrent en elle. C’est elle qui est, évidemment, le terme de la création. C’est une réalité distincte de la forme. C’est quelque chose de positif, qui est le réceptacle de la forme.

» On dit, toutefois, que c’est un être en puissance, parce qu’une chose existe d’autant plus en puissance qu’elle possède moins d actualité ; or, comme elle est capable de recevoir toutes les formes substantielles et accidentelles, elle existe surtout en puissance à l’égard de ces formes ; voilà pourquoi, à l’imitation sède pas, eu effet, (actualité qui distingue, qui divise, qui est tence spécifique ; mais elle est ce qui, grâce au sujet, peut recevoir cet acte ; elle est cause du composé ; elle ne peut donc pas être un pur néant, car le néant est incapable de recevoir quoi que ce soit. »

Contre la doctrine d’Henri de Gand et de Richard de Middleton, Gilles de Rome avait accumulé les arguments qu’Aristote, Averroès et Saint Thomas lui fournissaient en abondance. Ces arguments, Scot les connaît et les résume fort exactement :

« Tout ce qui advient à un être déjà en acte est accident ; si donc la matière est déjà une entité en acte, si elle est distinguée de la forme par un caractère actuel, si on lui donne seulement le nom d’être en puissance parce qu’elle est apte à recevoir l’acte qui complétera la détermination spécifique, tout ce qui lui pourrait être adjoint, constituerait avec elle un être doué seulement d’unité accidentelle. De cette manière, tout changement substantiel serait supprimé… De deux êtres en acte ne peut se former une chose qui soit une par elle-même ; la matière, donc, qui, de cette façon, est en acte ne pourrait avec la forme, donner une chose une par elle-même ; il n en résulterait pas un composé qui soit un par lui-même. »

Ces objections ont été presque textuellement empruntées à Gilles de Rome ; voici comment Scot les résout :

« Je répète que la matière est une entité qui peut être posée (positiva) hors de l’esprit et hors de sa cause ; par cette entité, la matière est le réceptacle (capax) des formes substantielles qui, elles, sont purement acte.