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GUILLAUME VARRON

pas trouvé, en ses Questions sur les Sentences, de déclaration explicite à ce sujet. Mais en une de ces questions, parmi les autorités favorables à la thèse qu’il soutient, nous le voyons citer un auteur[1] au gré duquel « il y a une matière universelle, la matière première, qui est la matière de toutes les créatures ; cet auteur admet que toute créature qui existe par elle-même est composée de matière et de forme, que cela est vrai aussi bien de la créature corporelle que de la créature spirituelle, c’est-à-dire de l’intelligence et de l’âme ; il le prouve, en particulier, pour l’intelligence et pour l’âme à l’aide de neuf arguments. »

L’ouvrage auquel Varron fait allusion en ce passage soutenait la doctrine d’Avicébron ; cet ouvrage était-il le Fons vitæ ? Nous n’y trouvons pas cette suite de neuf arguments dont parle le Franciscain anglais. Nous les voyons, au contraire, soigneusement énumérés, en cet abrégé du Fons vitæ que M. Clemens Baeumker a trouvé dans un manuscrit du monastère cistercien de Lilienfeld, et qu’il a publié à la suite du traité d’Ibn Gabirol[2]. Il est donc vraisemblable que Guillaume Varron connaissait les doctrines du Philosophe Juif par cet ouvrage de seconde main.

Il les connaissait aussi par un autre traité de seconde main ; à la suite, en effet, du passage que nous venons de rapporter, nous lisons :

« Item, in Collatione philosophorum de ente et uno, percipio (?) quia materia est contraria unitati eu quod materia per se diffluit et de natura sua habet dividi et multiplicari ; unitas vero retinet, unit et colligit », La phrase citée se trouve textuellement, en effet, en ce traité De unitate et uno que Dominique Gundisalvi avait composé[3] et que, bien souvent, on attribuait à Boëce, Varron ne lui donne pas cette fausse attribution ; le titre sous lequel il le cite lui convient parfaitement, car Dominique Gundisalvi y a rapproché les unes des autres des pensées de Boëce et des pensées d’Avicébron.

Varron connaissait donc divers écrits relatifs à la Philosophie d’Avicébron. Adoptait-il, comme Richard de Middleton, 1 enseiï.

1. Guliblmt Varonis Op. laud, ; Librî II quæst* XLVïl (Dialinctionis XII, quæst, 1) : Utrum materia prima sit creata a Deo, Ms, ciL, fol. i44i d,

2. Épitome Campilïliensis, tract* IV. — Avencebrolis (Ibn Gebirol) bons vifrp esc Araùico in Lafinam translatas ah Iohanne üispano et Dominjco Gundissalino. Edidit Clemens Baeumker (Beitrâgre sur Geschichte der Philosophie des Afillelalters, Bd I, Heft 2-4, Munster, i8g5, pp- 373-374)-

3. Die dent fioethius fîïlschlich zupeschr/ebene Abhandlunff des Dominicus Gundisalvi De unitate. liera usge^eben von Dr Paul Gorrens (Ztet/rutje xur Geschichte der Philosophie des Mittelalters, Bd, I, lleft is Munster, iSgi ; p. 5),

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