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HERVÉ NÉDÉLEC

homme ou animal, ou bien un adjectif, tel blanc ou coloré, par son sens (significatum} direct et explicite ne désigne rien d’autre que cette nature substantielle ou accidentelle, l’humanité, l’animalité, la blancheur, la couleur ; c’est celte nature que les susdits termes désignent d’une manière concrète. Toutefois, par leur manière de la désigner (ex modo signif’tcandt), ces termes concrets introduisent (important} implicitement tout ce qui peut appartenir au sujet, au suppôt (supposîtiim) possesseur d’une telle nature. Un homme, par exemple, c’est même chose que ce qui possède l’humanité ; cependant, par sa façon de désigner, ce terme : un homme, implique tout ce qui peut être possédé par un sujet porteur de la nature humaine. C’est pourquoi, dans la catégorie de la substance, le terme concret, par sa façon de désigner, n’exclut point les accidents ; que dis-je, il les introduit d’une manière implicite ; au contraire, par sa façon de désigner, le terme abstrait exclut les accidents.

» Il faut, en second lieu, savoir que ce terme : l’être (essej peut être entendu de deux manières, comme on l’a dit plus haut.

» On le peut entendre, d’une première façon, de l’acte même possédé [par la chose qui est]. C’est en ce sens que nous disons : L’être est un certain acte, et cet acte, c’est l’essence, comme l’acte qui consiste à courir, c’est la course. C’est en ce sens qu’on prend le terme être (me) quand on parle de l’être d’essence.

» D’une seconde façon, on le peut prendre pour désigner le fait de posséder l’acte dont il s’agit ; le terme être implique alors une certaine note verbale, une certaine manière d’être à l’égard d’une certaine chose qui possède cet acte

Je dis alors que si l’on prend l’être au premier sens, c’est-à-dire pour cet acte qui est l’essence et qu’on appelle l’être d’essence, une créature, considérée d’une manière concrète, un homme ou un animal par exemple, n’est pas son être, car il n’est pas non plus son essence considérée d’une manière abstraite ; un homme, en effet, n’est pas son humanité, et cela parce que le terme : un homme, en vertu de sa façon de désigner (ex modo significandi), introduit d’une manière implicite autre chose que l’humanité ; il introduit tout ce qui peut être possédé par un suppôt de la nature humaine.

» Si nous prenons l’être au second sens, on ne peut plus dire, ni au sein abstrait ni au sens concret, que l’essence d’une créature en soit l’être ainsi considéré ; en effet, l’être, considéré de la

1. Au lieu de : ai ! aliqsod habens, le texte porte : ad altquod a gens.