Page:Duhem - Le Système du Monde, tome VI.djvu/345

Cette page n’a pas encore été corrigée
335
HERVÉ NÉDÉLEC

dans l’essence des choses sensibles ; c’est, surtout, en effet, de la réponse à celte question que dépend la solution des autres questions.

» Touchant cette question, je n’ai pas l’intention de traiter en détail de la théorie des formes ; ce serait trop long ; mon intention, c’est de montrer que ce qui appartient en propre à cet hommc-là est dénué de vérité ; je le veux réfuter. À ce sujet, je me propose de faire trois choses. J’entends, premièrement, réfuter sa thèse en elle-même et dans ce qui est propre à l’auteur. J’entends, en second lieu, dire ce qu’il convient de supposer. En troisième lieu, en répondant à ses raisons, j’entends montrer que scs motifs sont nuis.

» La thèse qui est sienne, qui lui est propre, la voici : Dans les êtres autres que l’homme, il n’y a qu’une forme ; dans l’homme, il y en a deux ; l’une, qui est l’âme, vient du dehors ; l’autre, qui est la forme de corporéité, vient du dedans.

» Cette thèse, je l’entends réfuter par quatre raisons ; la première est directement démonstrative ; les trois autres sont des réductions à l’absurde.

» La première se tire de l’existence que donne la forme substantielle ; elle procède ainsi :

» Dans les êtres autres que l’homme, selon lui, il ne saurait y avoir plusieurs formes substantielles, parce que chacune d’elles donnerait l’existence (esse existentiæ) pure et simple (simpliciter) et complète. Mais si l’on admet en l’homme plusieurs formes substantielles, il faut aussi que chacune d’elles donne Lexistence pure et simple, l’existence complète. De même, donc, qu’à son avis, 1 existence de plusieurs formes substantielles en d’autres êtres est impossible, de même est impossible en l’homme l’existence de plusieurs formes substantielles.

» La majeure de cet argument, je la lui emprunte ; en effet, il dit expressément que si, dans une substance autre que l’homme, il y avait plusieurs formes substantielles, elles donneraient plusieurs existences pures et simples, ce qui ne peut être ; selon lui, donc, dans les substances autres que l’homme, il ne saurait y avoir plusieurs formes substantielles.

» Quant à la mineure, je la démontre de deux façons et, premièrement, comme suit :

» Ce qui convient à la forme substantielle en tant qu’elle est forme substantielle convient à toutes les formes substantielles. Mais donner l’existence pure et simple, c’est chose qui convient à la forme substantielle en tant quelle est forme substantielle, et