Page:Duhem - Le Système du Monde, tome VI.djvu/325

Cette page n’a pas encore été corrigée
315
GILLES DE ROME

ouvrage, au premier livre Du Ciel et du Monde, et presque partout où il traite de ce sujet, son opinion est la suivante : Le ciel est simple d une certaine manière ; c’est une certaine substance simple dont le moteur est une intelligence qui est comme l’âme du ciel… Le ciel ne mérite donc pas d’être appelé matière ; au ciel, il n’y a pas vraiment de matière… Il veut que le moteur du ciel soit, en quelque façon, la forme du ciel, qui est uni au ciel par une espèce de composition. Quant au ciel lui-même, il admet que c’est un corps simple, non composé de matière et de forme, ni de plusieurs substances.

» Cette thèse, bien qu’Averroès la soutienne en plusieurs endroits, il l’examine tout spécialement au De substantia orbis. C’est en vue de répondre au Commentateur même que nous avons soulevé cette question, car, en ce point, il va en l’encontre de la vérité. »

Gilles de Rome, non content de réfuter les arguments d’Averroès à l’encontre de la matière céleste, en construit à son tour pour démontrer l’existence de cette matière[1]. Parmi ces arguments, l’un des plus intéressants est tiré des différences d’opacité et de transparence que l’on observe entre les astres et les orbes en lesquels iis sont logés[2]. « Le Philosophe lui-même veut que l’étoile soit la partie la plus dense (spissior) de l’orbe qui la porte. 11 faut donc qu’entre ses diverses parties, le ciel ait une certaine [différence de] composition, puisqu’une partie est plus dense que l’autre ; or, selon ce que dit le Philosophe au second livre De generatitme, une telle [différence de] composition présuppose, au sein des diverses parties, quelque chose d’un et d identique : elle présuppose l’existence d une matière en chacune de ces parties… Si donc, au ciel, il y a une telle’différence dej composition qu’une partie soit plus dense que l’autre, que l’astre soit plus dense que son orbe, il faut qu’il y ait, dans les diverses parties du ciel, une matière grâce à laquelle elles puissent recevoir celte composition [différente de l’une à l’autre]. »

De ces arguments, l’archevêque de Bourges se croit en droit de tirer la conclusion suivante :

« Le corps du ciel[3] n’est pas un corps simple, un corps non

1. Ægjdh Romani de materia c&li ; (juæsi. I, —— Opns Aeaxie/neron, Pars !, capp. VI et Vil* — Opas super secundo fibro Sententiaram, Dist. XIlt Pars II : De materia Quæst. III : De materia per comparalicmem ad corpora caelestia.

2. Ægidti Romanf Çhtæsltozies de materia c^eZi, quæst. 1 ; éd. cil.t foL 79, coJL c et d. — CL Ôpus hejsaemeron, Pars 1, cap* VI.

3. Ægjdh Romani Opas saper secundo libro Sententiarumt quæsL cit. ; éd. cil., fol* sign. col. a.

  1. 1
  2. 2
  3. 3