Page:Duhem - Le Système du Monde, tome VI.djvu/298

Cette page n’a pas encore été corrigée
288
D’HENRI DE GAND À DUNS SCOT

Philosophe en tout ce qu’il dit ici de la perpétuité du mouvement, tout cela est poison pour la foi.

» Il a admis, en effet, que la génération et la corruption ne prendraient jamais lin parce que le mouvement local ne cessera jamais. Selon lui, d’ailleurs, le mouvement local ne s’arrête jamais car, seul, le mouvement d’un mobile corruptible peut se corrompre. Or cela est directement contraire à notre foi, car nous admettons que le mouvement du ciel s’arrêtera.

» Ce qui portait le Philosophe à admettre que les corps célestes et incorruptibles se meuvent d’un mouvement éternel et incorruptible, c’est ce principe : Les intelligences qui meuvent ces corps sont disposées de la meilleure manière possible lorsqu’elles meuvent ; afin donc qu elles soient toujours en la meilleure disposition, elles seront toujours motrices.

» Que la génération et la corruption ne doivent pas continuer sans cesse ; que les mouvements de cette sorte n’existent pas éternellement ; que ces mouvements, qui plus est, doivent finir dans le temps comme ils ont commencé dans le temps, nous l’avons, plus complètement, prouvé au De generatione. Que celui donc qui veut étudier à fond cette matière recourre à ce, qu’en ce livre, nous avons traité d’une manière détaillée. »

Gilles eût également pu renvoyer le lecteur à son écrit sur le De generatione, afin qu’il y trouvât la réfutation de l’argument bien connu par lequel on montre que le temps n’a pu commencer : « Les arguments de ce genre, dit-il[1], sont sophistiques. Le temps qui a précédé la création des choses ne fut pas un temps véritable ; c’est seulement un temps imaginé... Que tous ces De même que Dieu a fait le monde en ce temps-ci et non pas en ce temps-là, de même l’a-t-il fait en ce lieu-ci et non pas en cc lieu-là. Si donc un lieu autre que celui où le momie se trouve ne saurait être qu’un lieu imaginé, car hors du monde il n y a pas de lieu, si ce n’est par imagination, de même, un temps autre que le temps en lequel le monde fut fait n’est rien qu’un temps imaginé. »

Cet argument, ce n’est pas à Aristote que Gilles l’oppose, c’est au Commentateur dont il réfute les preuves en faveur de l’éternité du Monde, après les avoir rangées sous ces cinq chefs[2] :Preuves

1. Ægidii Romani Op. laud., lib. Mil, lect. VI, dubium 3m ; éd. cit., fol. i64, col. a.

2. Ægidii Romani III, lect. VI ; éd. cil., fol. 162, col. d, à fol. 164, col. b.

  1. 1
  2. 2