Page:Duhem - Le Système du Monde, tome VI.djvu/288

Cette page n’a pas encore été corrigée
278
D’HENRI DE GAND À DUNS SCOT

« Il faut savoir, dit-il en cet ouvrage[1], qu’il y a, pour les formes substantielles, à considérer deux genres de degrés ; l’un de ces genres est seulement selon la raison et l’autre selon la réalité.

» Le premier genre de degrés se trouve établi entre une forme commune et une forme plus spéciale ; selon la raison, en effet, on connaît qu’une chose est un corps avant de connaître qu’elle est tel corps, qu’elle est, par exemple, du feu ; cependant, ce n’est pas par une forme autre que celle du feu que cette chose est, à la fois, feu et corps… Toute forme, qui est actuellement telle, présupposerait donc la forme de corps comme l’espèce suppose le genre, si la thèse d’Avicébron était véritable ; cette thèse suppose, en effet, qu’il y a dans les formes des degrés réels disposés selon la suite descendante des prédicamcnts, semblables aux degrés qui s’y trouvent selon la raison et l’intention du Philosophe. En définissant donc une forme corporelle, si imparfaite soit-elle, on dirait alors qu’elle est l’acte d’un corps ; on ne dirait pas que le feu est composé de matière et de forme, mais bien d’un corps et d’une forme, savoir do la forme du feu.

» Mais la forme générique et la forme spécifique ne diffèrent que selon la raison. En effet, si le feu était corps par une forme et feu par une autre forme ; si, lorsque du feu est détruit et de l’air engendré, la forme corporelle demeurait la même ; s’il y avait réellement, dans l’air engendré, la même corporéité qui se trouvait daus le feu détruit, la forme générique serait véritablement univoque (esset vera univocatio in forma generistt) ; le genre exprimerait une forme unique ; or, vers la tin du septième livre des Physiques, le Philosophe prouve le contraire par des raisons multiples.

» Il faut donc admettre qu’en un composé, il y a une seule forme substantielle.

» Mais cela est-il vrai de n’importe quel composé ? Il y a doute au sujet de l’homme. Y a-t-il, en l’homme, plusieurs formes substantielles ou non ? Nous avons décidé, quant à présent, de ne rien déterminer à ce sujet, car la solution de cette question réclame une science plus élevée. Lors donc que nous parlons de l’unité des formes, nous voulons toujours qu’il soit fait exception de l’homme. »

Cette réserve met Gilles de Home à l’aise pour exposer la théorie de l’unité de la forme substantielle. II explique, comme

l. Ettpüsitio domini Egh>ii Romani super libros de A mina. Venetiis, Simon de Lucre, i5oo, Lib II, circa hune textum : Ampliusautem immanifestant si sit corporis aclus aminad„ dtibium 2m ; foL colL a et b.

  1. 1