deux manières ; on la peut considérer comme une image de l’idée que connaît la pensée divine ; on la peut considérer comme un effet de la puissance créatrice de Dieu ; lorsqu’on la rapporte à Dieu pris comine cause exemplaire, on en conçoit l’essence ; lorsqu’on la rapporte à Dieu pris comme cause efficiente, on en conçoit l’existence. Le premier rapport peut être conçu indépendamment du second ; il peut être conçu comme étant accompagné du second ou comme ne l’étant pas : « De cette manière, l’essence ou la nature d’une créature se comporte suivant une entière indifférence à l’égard de l’être et du non-être ; non pas quelle puisse ne posséder ni l‘un ni l’autre, car ce sont des contradictoires ; mais, par sa propre nature, elle n’est pas si étroitement déterminée à l’un des deux qu’elle ne puisse recevoir l’autre ; en effet, l’essence de la créature n’est pas, par elle-même, tellement déterminée à la non-existence actuelle qu’elle ne puisse, d’autrui, recevoir effectivement l’existence actuelle ; et d’autre part, lorsqu’elle a, d’autrui, reçu l’existence, elle ne la possède pas si bien quelle ne retombe dans le non-être pour peu qu’elle soit abandonnée à elle-même ». C’est là, textuellement, l’enseignement d’Henri de Gand.
C’est à celui de Richard de Middleton que les paroles suivantes[1] font allusion :
« Certains ajoutent que l’on peut considérer l’essence ou quiddité d’une chose sous trois aspects, suivant les trois manières d’être qu’elle peut avoir : La première c’est la manière d’être qu’elle a hors de l’esprit, dans la réalité ; on la peut nommer l’existence de nature. La seconde, c’est la manière d’être qu’elle a en l’intelligence ; on la nomme l’existence de raison. La troisième, c’est la manière d’être qu’elle a en elle-même ; on la nomme l’existence essentielle (esse essentiæ) ».
Telle est la doctrine que Godefroid va combattre.
Et d’abord, entre l’existence et l’essence, doit-on mettre une distinction réelle ? « Doit-on dire[2] que l’existence actuelle de l’essence est chose réellement distincte de l’essence, de même que la forme, actualité de la matière, est réellement distincte de la matière ? »
À cette question, Godefroid commence par répondre, avec quelque timidité : « Ce que l’on peut dire de plus probable (dicitur probabilius) c’est que l’existence n’est pas chose réellement