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LA DOCTRINE DE PROCLUS ET LES DOMINICAINS ALLEMANDS

niciens arabes, que les moteurs des cieux sont de deux sortes, des Intelligences et des Âmes ; il se propose[1], en premier lieu, de considérer « la différence qui existe entre les Intelligences et ces sortes d’Âmes ou de moteurs célestes, et cela scion les Philosophes, qui ont recherché ce point avec beaucoup de soin, avec une curiosité et une attention recommandables. »

Les Intelligences et les Âmes appartiennent à un même genre, en ce que les unes et les autres « sont les principes qui causent les choses célestes et les autres choses qui viennent ensuite, et cela à titre de causes essentielles. »

En outre les Intelligences sont[2], « des intellects qui, par essence, sont en acte ; c’est par là, selon les philosophes, qu’elles peuvent être et qu’elles sont, les principes qui causent les choses. C’est pourquoi Proclus dit, en sa 171e proposition : « C’est en comprenant que tout intellect produit ce qui vient après lui ; son œuvre est de connaître et, par cette connaissance, de produire (factio intelligere et intelligentia facere). » En lui, en effet, l’intellect et l’être sont, en quelque sorte, même chose ; si donc c’est par son être (esse) qu’il fait une certaine chose, et si son être consiste en la connaissance, c’est par la connaissance qu’il fait cette chose.

« De même, ces principes formels des cieux que nous appelons les Moteurs et les Âmes célestes sont des intellects qui, par essence, sont en acte ; mais ils sont en acte d’une manière moins élevée que tes Intelligences[3]. »

Après avoir ainsi marqué les caractères qui sont communs aux Intelli gences et aux Ames des cieux, notre auteur va nous dire en quoi elles diffèrent.

Ce qui est le propre des Intelligences[4] c’est d’être « les principes qui produisent toutes les choses autres qu’elles-mêmes ; ces choses, elles ne les produisent pas à partir d’un sujet préexistant ; mais elles ne les produisent pas non plus sans l’intervention d’un Principe plus élevé qui dépose en elles, le pouvoir d’agir de la

1. Theodoricus de Friburgo De intelligentiis et motibus cœlorum Cap. Inl : De differenüa inielligeotiaru m et molorum cælestium corporum quos animas cælornm vneant cum ratione differendi. Bibliothèque Vaticane, Ms. no 2188, fol. 5t>, col. b.

2. Theodorici de Friburgo O/»./ûtfrf* ; Cap. 2111 : Ouod tain intelligentiæ quam m0tores corporum cælestium sint ÎDlelleclus in actu per suam essentiam et quod. secundum hoc. sint principia rerum causa lia second um philosophes, et qualiter. Ms. no 2188, fol. 56, col. c.

3. ΠΡΟΚΛΟΥ ΔΙΑΔΟΧΟΥ ΠΛΑΤΩΝΙΚΟΥ Στοιχείωσις θεολογική, éd. Creuzer, prop. CLXXIV : éd Fraucofurïi ad Mœnum, 1822, pp. 208-259 ; édition adjointe à Plotini Enneades, Parisisiis, Firmin-Didot, 1855, p. CVI.

4. Thierry de Freiberg, loc. cit.

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