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CHAPITRE III
LA DOCTRINE DE PROCLUS
ET LES DOMINICAINS ALLEMANDS

I
ULRICH DE STRASBOURG


Dieu est simple ; tous les êtres inférieurs à Dieu sont complexes et leur nature se laisse dédoubler. Depuis Aristote, la Métaphysique n’est, pour ainsi dire, qu’un long commentaire de cette pensée.

En tout être changeant, on peut distinguer ce qu’il est vraiment de ce qu’il est capable d’être, ce qu’il est en acte de ce qu’il est en puissance ; ce qu’il est en acte, il l’est par sa forme ; ce qu’il est en puissance, c’est sa matière ; la substance de tout être changeant est donc composée de forme et de matière.

Au contraire, un être immuable est tout cc qu’il est capable d’être ; en lui, tout existe en acte, et rien en puissance ; il est pure forme et n’a point de matière ; il est une intelligence immatérielle ; telle est le premier Moteur de l’Univers qui est le Dieu suprême ; telles sont les Intelligences motrices des orbes célestes, qui sont des êtres divins.

Telle est la doctrine d’Aristote.

Cette doctrine, un Thémistius l’allie avec l’enseignement de Platon sur les espèces et les individus. Au gré du Péripatétisme, la forme est unique pour tous les individus d’une même espèce ; c’est par son union avec la matière, et par là seulement, qu’elle se subdivise en individus multiples ; on peut donc identifier la forme avec l’espèce, l’εἶδος d’Aristote avec l’εἶδος de Platon.