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HENRI DE GAND

rappelé[1], pour en accepter la pensée, un propos d’Aristote et d’Averroès :

« C’est par la même [raison] qu’une chose a l’existence et qu’elle est vraie, bonne et une ; cela provient simplement de ce quelle est, en son essence, une ressemblance et une image de l’existence, delà vérité, de la bonté et de l’unité de Dieu »

» Au sujet de la bonté, cela se peut prouver par ce qu’en dit Boèce au livre De hebdomadibus[2]. Au sujet de la vérité, on en trouve la preuve au traité De la vraie religion, de Saint Augustin.

» De l’un et de l’être, le Philosophe affirme ouvertement cette proposition au quatrième livre de la Métaphysique, lorsqu’il prétend[3] qu’il n’y a aucune différence entre ces locutions : homme, homme unique, homme existant. En cet endroit, le Commentateur écrit[4] : Lorsque nous disons tel homme, un homme qui existe, un homme unique, ce sont propos qui se peuvent mettre l’un à la place de l’autre ».

En faveur de sa thèse, Henri, qui vient d’invoquer le De hebdomadibus de Boëce, aurait pu également faire appel à l’autorité de ce traité De unitate et uno que Dominique Gundisalvi avait composé mais qu’avec une entière unanimité, le Moyen-Age attribuait à Bocce. En effet, parmi les premières phrases de ce petit traité, nous lisons celles-ci[5] :

« Non seulement c’est par l’unité qu’une chose est une, mais encore une chose n’est cc qu elle est que tandis que l’unité réside en elle. Lorsqu’elle cesse d’etre une, elle cesse aussi d’être ce qu’elle est, ce par quoi elle est telle chose. Tout ce qui est, donc, tient son existence de ce par quoi il est un. Non solum autem unitale [res] una est, sed eliam tamdiu est quicquid id quod est, quamdiu in se unitas est. Cum autem desinit esse unum, desinit esse id quod est, itnde est hoc. Quicquid est, id eo est quod unum est… De même que c’est l’unité qui amène une chose à l’existence, c’est elle aussi qui la garde en cette existence. L’existence et l’unité s’accompagnent l’une l’autre d’une manière inséparable ; elles semblent être simultanées par nature. Comme le Créateur

1. Henrici a Gandavo Quodlibeta ; quodlib. I, quæst. IX ; éd. cit., fol. I, verso, et fol. VII, recto.

2. Autre titre du traité De Trinitate.

3. Aristote, Métaphysique, livre III (marqué IV au Moyen-Âge), ch. II.

4. Avbrkois Cûrdubensjs /n libros metaphysicæ Arittotelis commenlani, lib. IV, cap. Il, Cûmm. 3* „ a

5. Anith Maniai Severini Büethi Opéra. Baaileæ, ex officina lien rie pétrin a* MJDLXX, p. 1274.

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