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LA CRUE DE L’ARISTOTÉLISME

transformation ; il n’a jamais changé et il ne changera jamais ; il est le centre de toute perfection. C’est l’image qui embrasse toutes les images, l’image qu’on voit partout et sous loules les formes, mais seulement comme reproduction et peinture, tandis que nul n’a vu ni ne peut voir l’image réelle et authentique… L’Ancien sacré et la Petite Figure sont la même image. »

L’Idra zouta parle en termes analogues « de l’Ancien sacré, du Mystérieux des mystérieux. »

« Il est séparé de tout, dit-elle[1], et, en même temps, il n’en est pas séparé, puisque tout est en lui et lui en tout. L’Ancien des anciens, le Mystérieux des mystérieux est établi et, en même temps, il ne l’est pas ; il est établi, puisqu’il soutient tout, et en même temps, il ne l’est pas, puisqu’on ne le trouve nulle part.

» Quand il s’établit, il projette neuf lumières éclatantes qui se séparent dans toutes les directions, telle une lampe dont la clarté se répand dans toutes les directions ; et quand on s’approche de cette clarté que répand la lampe, on ne trouve rien en dehors de la lampe elle-même ; tel est également le cas de l’Ancien sacré, de la Lampe sublime et très mystérieuse. On ne trouve nulle part Dieu ; ou trouve seulement les lumières qu’il répand et qui paraissent et disparaissent tour à tour. Ce sont ces lumières qu’on désigne sous les noms sacrés. Aussi tous les noms ne désignent-ils qu’une seule et même chose. »

« Comme l’Ancien sacré est un, dit encore le même traité[2], tout en lui est joie, et cela invariablement. « Ne croirait-on pas entendre Plotin ou Proclus décrivant l’Un absolument immuable, où tout est en acte ?

Dans Élohim, dans la Petite Figure, l’Idra rabbi nous convie[3] à contempler deux côtés, celui par lequel Élohim est en Dieu, celui par lequel il est dans le Monde. « Et maintenant, dit-elle, dirigez vos idées sur la sagesse suprême à l’aide de laquelle la Grande Figure se métamorphose en Petite Figure. Représentez-vous son essence connue venant d’ici et de là, c’est-à-dire composée de ciel et de terre, de divin et d’humain, d’immatériel et de matériel, tel un homme composé de corps et d’âme. La Petite Figure est ainsi faite afin de s’asseoir sur le Trône, ainsi qu’il est écrit : « Et au dessus du Trône, il paraissait comme un homme assis sur ce Trône » l’Homme qui est la synthèse de tous les noms sacrés, l’Homme en qui sont enfermés tous les mondes d’en haut et d’en bas.

  1. Zohar, III, fol. 288a ; t. VI, p. 82.
  2. Zohar, III, fol. 288a ; t. VI, p. 83.
  3. Zohar, III, fol. 288a ; t. VI, p. 354.