tions : Le moteur immédiat de chaque ciel est une âme ; cette âme est unie au corps de l’orbe à titre de forme ; cette union est semblable à celle qui existe entre l’âme et le corps de l’homme. C’est dans la Somme contre les Gentils que nous rencontrerons ce nouvel aspect de la pensée de Saint Thomas.
Saint Thomas se propose[1] de démontrer qu’en l’homme, au dire d’Aristote, « l’intelligence est unie au corps à titre de forme. » Dans ce but, il raisonne ainsi :
« Aristote… montre que tout être qui se meut de lui-même est nécessairement divisé en deux parties, dont l’une meut tandis que l’autre est mue Or, suivant Aristote, tout être ainsi constitué est un être animé ; aussi dit-il expressément, au second livre Du Ciel, que le ciel est un être animé… Examinons donc, selon l’opinion d’Aristote, de quelle sorte d’âme le ciel est animé.
» Aristote prouve, au XIe livre de la Métaphysique, qu’il faut, dans le mouvement du ciel, considérer un moteur exempt de tout mouvement et un autre moteur qui est, lui-même, en mouvement. Le moteur immobile meut à titre d’objet désirable. S’il est désirable, c’est, sans aucun doute, pour le moteur qui est en mouvement S’il est désiré, d’ailleurs, ce ne peut être d’un désir de concupiscence, qui est le désir des sens, mais d’un désir intellectuel. C’est pourquoi le Philosophe dit que le premier moteur immobile est désirable et intelligible. Partant, ce qui est mû par ce moteur, c’est-à-dire le ciel, est doué de désir et d’intelligence, et cela d’une plus noble façon que l’homme, ainsi qu’il le prouve au même lieu. Le ciel donc, au gré d’Aristote, est composé d’une âme intellectuelle et d’un corps…
» D’autre part, il est certain que, suivant Aristote, le ciel ne possède pas d’âme sensitive, car il lui faudrait alors être pourvu d’organes différents les uns les autres, ce qui ne convient pas à un corps simple… L’intelligence ne peut donc être en continuité avec le corps céleste par l’intermédiaire des représentations de l’imagination. Par conséquent, il nous faudra dire que l’intelligence, par sa substance même, est unie au corps céleste à titre de forme (Oportebit dicere quod intellectus secundum suam substantiam uniatur corpori cælesti ut forma)…
» D’ailleurs, ce qui vient d’être dit de l’animation du ciel n’est pas affirmé au nom de l’enseignement de la foi ; qu’on dise d’une
- ↑ Sancti Thomæ Aquinatis Summa contra Gentiles, lib. II, cap. LXX : Quod secundmn dicta Aristotelis oportet ponere intellectum uniri corpori ut formam.