Saint Thomas lui-même nous invite à la composer avec celle d’Avicenne ; nous lisons, en effet, au second chapitre du De ente et essentia :
« Dans les substances composées, le nom d’essence désigne ce qui est composé de matière et de forme. Cette opinion s’accorde avec une parole de Boëce en son commentaire aux Prædicamenta ; il y dit que « l’οὐσία signifie le composé. » Or οὐσία, chez les Grecs, a le même sens qu’essentia chez nous, comme le dit Boëce lui-même au traité De duobus naturis. D’autre part. Avicenne dit que la quiddité des substances composées n’est pas autre chose que la composition de matière et de forme. »
Ce recours à l’autorité de Boëce se trouve également au premier livre des Questions sur les Sentences, composées par Saint Thomas.
Une de ces questions examine[1] « quelle distinction il convient d’établir en ces termes : essentia, subsistentia, substantia, persona, et entre les termes grecs correspondants : οὐσία, οὐσίωσις, ὑπόστασις, πρόσωπον. » Établir quelque règle fixe dans l’emploi de ces diverses dénominations, c’est une besogne dont la nécessité devait frapper toute intelligence éprise de clarté ; les théologiens, en effet, usaient de ces mots sans qu’aucune définition les eût déterminés ; il en résultait, dans les discussions, une confusion dont Gilbert de la Porrée s’était déjà plaint[2].
À la vérité, Thomas d’Aquin va justifier la confusion qui s’est établie entre ces termes, bien plutôt qu’il ne la va dissiper. « Sauf le nom de personne, chacun de ces noms se trouve mis tantôt sous le vocable quod est et, tantôt, sous le vocable quo est ; il ne semble donc pas qu’il y ait entre eux une distinction essentielle fondée sur l’une ou sur l’autre de ces deux manières d’être.»
« Sachez, poursuit-il, que lorsqu’une chose résulte de plusieurs autres choses combinées entre elles, la première chose ne peut pas être dénommée par une seule des dernières, lors même que celle-ci est principe du tout ; il la faut dénommer par le tout. Ainsi la saveur résulte de la chaleur et de 1’humidité combinées entre elles d’une certaine façon ; mais, bien que la chaleur soit le principe qui engendre la saveur, ce n’est pas de la chaleur qu’une chose tire le nom de sapide ; c’est de la saveur qui comprend, à la fois, la chaleur et l’humidité combinées ensemble.
» Je dis de même : Puisque l’existence (esse) résulte de la com-