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ALBERT LE GRAND

primæ Philosophiæ. » Albert y cite, d’ailleurs, sa Métaphysique en nombre d’autres circonstances[1]. L’opuscule en question est donc sûrement postérieur à la Métaphysique.

Or, cette constatation est d’importance, car la date du De unitate intcllectus contra Averroem est, connue. « La composition de ce traité, écrit le P. Mandonnet[2], est indubitablement de 1256 ; il a été écrit par Albert, pendant son séjour à la cour romaine, par ordre d’Alexandre IV, preuve non équivoque que le Saint Siège avait l’œil ouvert sur la destinée de l’enseignement d’Aristote. »

C’est encore après la composition de la Métaphysique que fut achevée celle du De principiis motus processivi ; on y lit, en effet[3] : « Dictum est a nobis… in hiis quæ sunt de prima Philosophia. » Ce livre est consacré aux mouvements des animaux. À la fin du premier chapitre, Albert nous rappelle qu’il a déjà traité ce sujet en son De motibus animalium ; « mais, ajoute-t-il, alors que nous voyagions en Campanie, non loin de la Grèce, nous eûmes connaissance du petit livre d’Aristote sur le mouvement des animaux ; nous avons eu soin, alors, d’intercaler ici ce qu’il en avait dit, afin que l’on sût si ce que nous avons écrit de notre propre inspiration s’écarte en quelque point de la subtilité du prince des Péripatéticiens. »

Ce voyage en Campanie dut suivre ou interrompre le séjour d’Albert à la cour d’Alexandre IV. Le traité De principiis motus processivi fut donc probablement écrit vers le même temps que le De unitate intellectus contra Averroem ; aucune indication, d’ailleurs, ne marque celui des deux ouvrages qui a précédé l’autre.

Nous arrivons enfin à l’une des œuvres les plus intéressantes d’Albert le Grand ; cette œuvre, intitulée : Liber de causis et processu universitatis a Causa prima, expose d’une manière méthodique toutes les pensées que la Philosophie juive ou arabe avait groupées autour de la doctrine de la procession des êtres, telle que le Liber de causis l’avait présentée.

Que cette œuvre ait été composée après la Métaphysique, nous en avons la certitude, car nous y relevons la phrase suivante[4] : « Multa talia in prima Philosophia a nobis contra Stoïcos dicta

  1. Alberti Magni De unitate intellectus contra Averroem libellus, cap. V, 28a ratio, cap. VII, ad 14m, ad 16m, ad 17m.
  2. P. Mandonnet, Siger de Brabant, Étude critique ; Louvain, 1911 ; pp. 61-62.
  3. Alberti Magni De principiis motus processivi liber, tract. I, cap. V, circa finem.
  4. Alberti Magni Liber de causis, lib. I, tract. I, cap. IV, in fine.