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ALBERT LE GRAND

refusé ; nous l’avons entrepris, vaincu par les supplications de quelques-uns d’entre eux.

» Nous l’entreprenons donc, tout d’abord, à la louange de Dieu tout puissant, qui est la source de la Science, le créateur de la Nature, le protecteur et le directeur du juste ; puis, pour l’utilité de nos Frères et, ensuite, de tous ceux qui, en le lisant, désireront atteindre à la Science de la nature.

» Voici quelle méthode nous adopterons en cet ouvrage :

« Nous suivrons l’ordre et l’opinion d’Aristote ; nous dirons tout ce qui nous semblera nécessaire pour expliquer et prouver cette opinion ; mais nous ne ferons aucune mention du texte même d’Aristote.

» En outre, nous ouvrirons certaines digressions propres à éclaircir les doutes qui surviendront et à suppléer ce qui, insuffisamment exposé, met, pour certains, de l’obscurité dans 1‘opinion du Philosophe.

» Nous avons subdivisé toute cette œuvre en chapitres affectés de titres.

» Partout où le litre du chapitre désigne simplement la matière qui y est traitée, c’est que ce chapitre prend place en la série des livres d’Aristote. Partout, au contraire, où le titre prévient qu’on va faire une digression, c’est que nous avons ajouté quelque chose, afin de suppléer à un défaut ou de prouver une proposition.

» En procédant de la sorte, nous produirons des livres en même nombre que ceux d’Aristote et sous les mêmes titres. Çà et là, nous ajouterons des parties aux livres demeurés inachevés ; parfois, aussi, nous ajouterons des livres remis ou omis, qu’Aristote n’a pas composés ou, s’il les a composés, qui ne nous sont pas parvenus…

» La Philosophie réelle, c’est-à-dire celle qui n’est pas causée en nous par notre œuvre propre, comme est produite la science morale, se compose de trois parties : ce sont la Philosophie naturelle ou Physique, la Métaphysique et la Mathématique. Notre intention est de rendre intelligibles aux Latins toutes les parties de cette Philosophie réelle. »

Albert le Grand n’a pas entièrement accompli sa promesse ; il n’a pas rédigé la troisième partie de son encyclopédie, celle qui devait exposer les Sciences mathématiques ; il est permis, d’ailleurs, de douter, avec Roger Bacon, qu’il fût en état de la mener a bien ; mais il a exposé tout ce qu’en son temps, comprenaient la Physique et la Métaphysique.

Il est possible, et il n’est pas inutile, de marquer avec préci-