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CHAPITRE XI
ALBERT LE GRAND

I
L’ORDRE DES TRAITÉS D’ALBERT LE GRAND


Au De Universo de Guillaume d’Auvergne, dans la Somme d’Alexandre de Hales, Les doctrines de la Philosophie gréco-arabe se sont offertes isolées les unes des autres ou réunies par petits groupes. La Scolastique latine a pu, sans grand effort, repousser la plupart de ces pensées détachées les unes des autres ; si quelques-unes sont parvenues à se glisser en elle, c’est en se fondant au sein de théories plus anciennes et, depuis longtemps, couverties au Christianisme ; du système que cette fusion avait produit vers l’an 1250, les Questions de Maître Roger Bacon nous ont donné un aperçu.

Voici maintenant que l’École ne se trouvera plus aux prises avec quelque pensée péripatéticienne ou néo-platonicienne détachée de l’ensemble auquel elle appartient et dont elle tire sa force ; ce qu’elle va trouver devant elle, c’est la Philosophie gréco-arabe tout entière ; tout ce qu’Aristote a élaboré, tout ce qu’Alexandre d’Aphrodisias, Thémistius, Proclus, Al Fârâbi, Avicenne, Al Gazâli, Ibn Bâdja, Ibn Tofaïl, Averroès, Avicébron, Maïmonide ont ajouté à l’œuvre du Stagirite, tout cela, méthodiquement rangé en un seul corps de doctrine, va se développer sous les yeux des maîtres des Universités latines ; d’un seul regard, étonné et ravi, ils vont embrasser et contempler tout ce qu’ont produit seize siècles de méditation philosophique.

Celui qui, pour cette imposante revue, a convoqué toutes les doctrines du Péripatétisme, du Néo-platonisme hellénique et du Néo-platonisme sémitique, c’est le fils du comte de Bollstædt, le Frère