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LA CRUE DE L’ARISTOTÉLISME

» Supposons, au contraire que la lumière, tandis qu’elle se répand en divers sens, se trouve incorporée à la matière ; si elle se distend et distend avec elle la matière corporelle, il y a raréfaction de la matière ou dilatation ; si elle se rassemble en elle-même et rassemble, en même temps, la matière corporelle, il y a, pour celle-ci, condensation ou contraction. Lorsque la lumière s’engendre suivant une trajectoire déterminée, il y a mouvement local.

» Enfin, si la lumière contenue dans la matière est expulsée au dehors, tandis que la lumière extérieure est introduite dans la matière, une altération se produit. »

» On voit par là que la puissance qui meut les corps c’est la force en vertu de laquelle la lumière se propage ; et cette force est un appétit corporel et naturel. »

Que le mouvement de la lumière soit la cause première de toute dilatation, de toute contraction de la matière, notre auteur l’admet en particulier lorsqu’il enseigne[1] que la substance du son est la lumière incorporée à l’air très subtil. » C’est cette lumière qui rend compte de l’élasticité de l’air ; ainsi, au xviie siècle » attribuera-t-on communément à l’éther cette même élasticité.

Mais Grosse-Teste demande à ses principes, de plus vastes conséquences lorsqu’il en prétend tirer[2] l’explication des figures prises par les cieux et par les éléments ; nous avons rapporté jadis cette explication[3] ; nous y avons relevé les traces qu’avait laissées la lecture de l’Astronomie d’Alpétragius.


V
le Liber de Intelligentiis

À la corporéité, à cette toute première forme qui, de la Matière première, fait tout corps, Robert de Lincoln a identifié la lumière. « Les savants, a-t-il écrit[4], jugent que la première forme corporelle est plus digne que toutes les formes suivantes, qu’elle les surpasse en vigueur, qu’elle est de plus noble essence ; elle est, à

  1. Ruberti Linconiensis In Aristlotelis Posteriorum Analyticorum libros commentaria, lib. II, cap. IV ; éd. cit., fol. 39, col. d.
  2. Ruberti Linconiensis Tractatus de inchoatione formarum ; éd. 1514 ; fol. 12, coll. a, b, c, d : éd. Baur, pp. 54-59.
  3. Seconde Partie, Ch. V, § VI ; t. III, pp. 284-287.
  4. Ruberti Linconiensis Tractatus de inchoatione formarum ; éd. 1514 ; fol. 11, coll. d. ; éd. Baur, p. 52.