du premier Principe[1], on peut distinguer ce qu’est cet être et ce par quoi il est ;… et toute chose en laquelle on peut distinguer ce qu’elle est (quod est) et ce par quoi elle est (quo est), est une substance composée. »
Ce principe, revient souvent, dans la Somme d’Alexandre. Parfois il y est pris, semble-t-il, comme équivalent à cette affirmation :
« Toute créature est composée de matière et de forme. » Ainsi en est-il au passage suivant :
Que l’âme humaine ait matière et forme, « cela paraît[2] par ce que dit Boëce au livre De la Trinité : « En tout ce qui vient après le premier Principe, il y a ceci et cela. In omni eo quod est vitra primum Principium, est hoc et hoc[3] ». Boëce parle des choses qui sont des substances par elles-mêmes, et non pas de la matière et de la forme ; sinon, on s’en irait à l’infini. Mais l’âme humaine est telle, car elle existe par elle-même, ce qui se manifeste par sa séparation d’avec le corps. Elle a donc en elle ceci et cela (hoc et hoc). Mais ce ne peut être matière et matière ni forme et forme ; l’une des deux, en effet, serait superflue, Ces deux choses seront donc matière et forme. »
Souvent, au contraire, Alexandre paraît regarder la distinction du quod est et du quo est comme n’étant pas la distinction de la matière et de la forme. Mais, à coup sûr, il n’hésite pas à formuler ce postulat[4] : « Un être créé, c’est ce qui est composé de ces deux choses, la matière et la forme. »
La distinction de la matière et de la forme n’est donc pas restreinte aux êtres corporels ; elle doit également s’introduire en la nature des êtres spirituels ; aussi Alexandre fait-il sienne[5] cette proposition de Saint Augustin : « Au commencement, Dieu fit le ciel et la ferre, c’est-à-dire qu’en son Verbe coéternel, il fit la matière de la créature tant spirituelle que corporelle. »
Attribuer une matière même aux créatures spirituelles, c’est le propre de la philosophie d’Avicébron dont la Somme, en ce point, suit fidèlement les leçons.
La créature angélique elle-même est composée de matière et de forme. « Bien que, selon certains philosophes[6], cette intelligence qu’on nomme ange soit une forme sans matière, on doit déclarer,
- ↑ Alexandri de Ales Summa theologica, pars II, quæst. XX, membrum II, art. II.
- ↑ Alexandri de Ales Op. laud., pars II, quæst. LXI, membrum I.
- ↑ Anitii Severini Manlii Boethii De Trinitate, (Boethii Opera, éd. Basileæ, MDLXX, p. 1122).
- ↑ Alexandri de Ales Op. laud., pars II, quæst. X, membrum I.
- ↑ Alexandri de Ales Op. laud., pars II, quæst. I, membrum II, art. III.
- ↑ Alexandri de Ales Op. laud., pars II, quæst. XIX, membrum II, art. II.