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GUILLAUME, ALEXANDRE, ROBERT

passage rappelle, c’est l’exposition donnée par Moïse Maïmonide[1] de la théorie d’Ibn Bâdja. Sans nier qu’Ibn Rochd ait été lu par Guillaume d’Auvergne, nous croirions plus volontiers que celui-ci s’est instruit auprès de Rabin Moses.


F. L’éternité du Monde.


Il semble bien que l’influence de Maïmonide se laisse encore reconnaître en ce qu’écrit Guillaume « de la nouveauté ou de l’éternité du Monde ».

« J’exposerai d’abord, dit-il[2], l’opinion d’Aristote et les raisons qui l’ont induit à professer cette opinion, ainsi que d’autres raisons qui ont pu le pousser au parti contraire. Quoi qu’on dise, en effet, et quel que soit celui à qui il plaira d’excuser Aristote, il fut certainement de cet avis : Le Monde est éternel, il n’a pas commencé d’être. Il a eu, du mouvement, une pensée toute semblable. Avicenne, après lui, ainsi que ceux qui ont exposé sa doctrine, ont apporté des raisons et des preuves en ce même sens. »

Lorsque Guillaume refuse d’admettre les excuses qu’on a invoquées en faveur d’Aristote, afin de le disculper d’avoir cru à l’éternité du Monde, ne semble-t-il pas qu’il désigne clairement la tentative faite en ce sens par Maïmonide[3], et par lui seul ?

En dépit de ce qu’il nous vient d’annoncer, ce n’est pas au début de sa discussion, mais à la fin, que l’Évêque de Paris nous fait connaître les arguments d’Aristote[4]. Il rappelle, d’abord, qu’il a déjà examiné les raisonnements donnés par le Stagirite, dans le livre « qu’il a appelé Auditus », en faveur de l’éternité du mouvement. Il expose ensuite les raisons de l’éternité du Monde qui sont données au « Liber Cæli et Mundi ».

Ce sont, en réalité, les raisons de l’éternité du Monde données par Avicenne en sa Métaphysique qui forment l’objet véritable de l’exposition et de la réfutation composées par Guillaume. Nous n’analyserons ni cette exposition ni cette réfutation qui sont fort longues et détaillées. Nous nous contenterons de citer une réponse aux arguments d’Avicenne, et de remarquer que cette réponse semble apporter un écho, direct ou réfléchi, de la Destructio phi-

  1. Vide supra, pp. 187-188.
  2. Guillaume Parisiensis Episcopi De Universo pars principalis prima pars II, tract. I, cap. VIII ; éd. 1516, fol. CXXXIX, col. c ; éd. 1674, pars II, cap VIII, p. 652, coll. a et b.
  3. Vide supra, pp. 188-189.
  4. Guillaume d’Auvergne, loc. cit, ; éd. 15i6, cap. XI, fol. CXLI, Coll. c et d, fol. CXLII, coll. a et b ; éd. 1674, cap. X, p. 656, coll. a et b.