Un peu plus loin, nous trouvons, dans le même Opusculum de opere sex dierum, un commentaire de ce texte : Et spiritus Domini ferebalur super aquas. Dans ce commentaire, se lisent les lignes que voici[1] :
« La matière étant désignée, l’auteur dit ensuite que la vertu de l’Ouvrier (virtus Artificis), vertu qu’il nomme l’Esprit du Seigneur, commande à la matière et la domine afin de l’informer et d’y mettre l’ordre. C’est à juste titre qu’après la matière, il a parlé de la vertu opératrice de l’Ouvrier ; c’est, en effet, par l’opération de cette vertu sur la matière que tout ce qui se voit au Ciel et sur la Terre a dû être produit. De soi, la matière est informe ; elle ne peut aucunement acquérir la forme, si ce n’est par une vertu qui opère en elle et qui l’ordonne ; cette vertu, c’est celle de l’Ouvrier… Cette vertu, les Chrétiens l’appellent l’Esprit-Saint. Puis donc que la matière ne reçoit pas les formes d’elle-même, puisqu’elle est informée par une vertu de l’Ouvrier, vertu qui la meut et qui opère en elle, Moïse, le plus sage des philosophes, après avoir signalé l’état informe de la matière, parle de la Vertu opératrice du Créateur, par laquelle la forme est appliquée à la matière. »
En tout cela, la pensée de Jean Scot transparaît clairement ; mais elle s’exprime dans un langage plus péripatéticien que celui dont l’Érigène avait usé ; et, tout aussitôt, sa ressemblance avec la pensée d’Avicébron s’en trouvé plus aisée à percevoir. À quoi faut-il attribuer ce léger changement ? Est-ce à la lecture du Fons vitæ ? N’est-ce pas simplement à l’étude des quatre premiers livres de la Physique d’Aristote, que Dominique Gondisalvi et Jean de Luna venaient de traduire, qui ont sûrement fourni à Thierry la connaissance des quatre causes péripatéticiennes ainsi que divers autres éléments de son Opusculum de opere sex dierum ?
Des doutes semblables surgissent à propos de certains passages insérés par Gilbert de la Porrée en son commentaire au De Trinitate de Boëce.
Du traité de Boëce, du commentaire de Gilbert de la Porrée, nous aurons à parler plusieurs fois dans ce chapitre et dans le suivant ; donnons-en donc, tout d’abord, une courte description.
Parmi les œuvres de Boëce (170-524), on trouve un petit ouvrage[2] dont l’authenticité a été contestée, et qui porte ce titre :