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LA KABBALE

jusqu’au Paradis terrestre ; là seulement, l’âme mâle et l’âme femelle ont été dissociées. Cette neschamah donc, qui a démérité et qui est maintenant réduite au rôle d’esprit occasionnel, a, dans le monde des âmes, une neschamah conjointe ; c’est celle-ci qui sera, pour celle-là, l’esprit rédempteur.

« Cet esprit rédempteur n’est autre que l’esprit conjoint. Comme ces deux esprits sont sortis unis de la région céleste, il est naturel que l’un des conjoints ait pitié de l’autre quand il est en détresse. »

Le couple de l’esprit rédempteur et de l’esprit occasionnel obtiendra ce qui était refusé à ce dernier lorsqu’il était seul. Ce couple va servir d’enveloppe à la neschamah qui descend sur terre pour la première fois afin d’animer un corps nouveau ; avec l’esprit originel de cette neschamah, l’esprit rédempteur et l’esprit occasionnel vont s’attacher au nephesch du corps nouveau.

Ainsi ce corps nouveau « est souvent animé de trois esprits[1] ; d’abord celui du conjoint qui attire l’âme de son époux ou épouse en détresse : ensuite, l’esprit errant ; enfin l’esprit originel de l’âme nouvelle dont ce corps est jugé digne… À l’heure de la résurrection, les esprits des deux conjoints retourneront dans leurs premiers corps. Quant au corps nouvellement formé, il sera animé par l’esprit originel de l’âme nouvelle dont ce corps a été jugé digne. »

Toutes ces superpositions et juxtapositions d’âmes qui tantôt se séparent et, tantôt, se réunissent ne satisfont pas encore les Kabbalistes. À toutes ces âmes, à tous ces esprits qu’ils supposent en un même homme, ils associent encore un être qu’ils laissent singulièrement vague et mal défini, et qu’ils nomment l’image ou la figure de cet homme.

Cette image se trouvait associée à la neschamah, dans le Monde supérieur, au moment où la conception de l’homme a déterminé la descente de l’âme dans le Monde inférieur.

« L’esprit[2] descend alors accompagné d’une image ; cette image accompagnait déjà l’esprit en haut au moment de la conception, et c’est avec la même image que l’esprit descend en ce monde.

» Tant que cette image se tient près de l’homme, celui-ci peut subsister sur la terre…

» L’image sainte se tient toujours au-dessus de l’âme, jusqu’à ce qu’elle vienne en ce monde. Dès qu’elle arrive en ce monde,

  1. Zohar, II, fol. 1000a ; t. III, p. 404.
  2. Zohar, III, fol. 43a ; t. V, pp. 119-120.