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LA CRUE DE L’ARISTOTÉLISME

nommés ; le feu a son séjour au Nord, l’air à l’Est, l’eau au Sud, la terre à l’Ouest.

» Remarquez que le feu est… du côté Nord parce que la chaleur et la sécheresse dominent dans le feu ; or le Nord, qui est le contraire de chaleur ci de sécheresse, a reçu en partage le feu pour que cet élément supplée à ce qui manque à ce point cardinal : voilà pourquoi le feu a été mêlé au Nord pour ne former qu’un corps avec lui. »

L’association de chaque élément avec le point cardinal qui lui correspond réunit ainsi les quatre qualités premières.

La théorie des qualités communes à deux éléments ou symboles, esquissée par Aristote, développée par le faux Ocellus, par Chalcidius, par Macrobe, par Saint Basile, par Némésius d’Émèse, trouve, dans les rabbins de la Kabbale des adeptes convaincus.

« Remarquez, disent-ils, que le feu appartient à un point cardinal, le Nord, et que l’eau appartient au point cardinal opposé, le Sud ; voilà pourquoi il y a incompatibilité entre ces deux éléments. Mais quand l’air se place au milieu, il attire les deux éléments des deux côtés en formant entre eux un trait d’union…

» Le feu est en haut ; l’eau est au-dessus de la terre ; entre le feu et l’eau, se trouve l’air qui unit les deux cléments précédents et leur enlève le caractère d’incompatibilité qui les distingue ordinairement. La terre porte ainsi l’eau d’abord ; l’air est au-dessus de l’eau et le feu est au-dessus de l’air ; les quatre éléments étant ainsi superposés, il s’ensuit que la terre tire sa force des trois éléments qu’elle porte sur elle,

» Remarquez que l’air appartient à l’Est ; l’Est est froid et sec et l’air est chaud et humide ; et c’est pourquoi il peut s’unir des deux côtés ; car le feu est chaud et sec, l’eau est froide et humide ; or l’air qui est chaud et humide s’attache par son côté chaud au feu, et le point qui est humide s’attache à l’eau. De cette façon, l’air concilie le feu et l’eau et leur enlève l’incompatibilité qui les sépare d’ordinaire, »

Chacun des quatre éléments est l’objet de considérations semblables à celles qui viennent d’être développées au sujet de l’air.

Dans le Zohar, donc, la théorie des symboles revêt exactement la forme que Saint Basile nous a présentée le premier[1], que Némésius d’Emèse[2] et Macrobe[3] ont reproduite.

En vertu de cette théorie, les quatre éléments forment une

  1. Tome II, pp. 480-481.
  2. Tome II, p. 485.
  3. Tome II, pp. 481-482.