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LA KABBALE

Ces mondes préexistants qui ont été détruits, ils « sont appelés étincelles volantes, dit l’Idra zouta[1]. La chose est comparable à un artisan qui travaille le fer ; il frappe avec le marteau sur le fer rougi ; de nombreuses étincelles se répandent dans toutes les directions ; mais il n’en reste pas trace au bout d’un instant ; ce sont les mondes préexistants ; et c’est pourquoi ils n’ont pas pu subsister, jusqu’à ce que l’Ancien sacré les eût affermis et que l’Artisan eût donné la forme à son œuvre. C’est pourquoi nous avons enseigné qu’une flamme fit jaillir des étincelles dans trois cent vingt directions ; ce sont ces étincelles qui sont appelées les mondes préexistants et dont l’existence a été éphémère. Ensuite l’Artisan donna la forme à son œuvre ; il lui donna une forme mâle et femelle, et grâce à cela tout subsiste, même les étincelles éteintes. De la Lampe éclatante sort une flamme qui frappe comme un marteau et fait jaillir des étincelles, les mondes préexistants. Celles-ci se mêlent à un air très pur, et leur éclat s’adoucit au moment de l’union du Père et de la Mère.

» Le Père, c’est l’esprit caché dans l’Ancien des jours, en qui est enfermé cet air très pur. Ce dernier s’unit à la flamme qui sort de la Lampe éclatante, cachée dans les entrailles de la Mère. »

« Avant la création du Monde actuel[2], les faces ne regardaient pas les faces, et c’est pourquoi les mondes préexistants ont été détruits. »

Ces mondes, antérieurs au Monde actuel, ne pouvaient subsister parce qu’ils résidaient uniquement dans la Pensée incapable de se manifester, parce que les deux hypostases mystérieuses, l’Ancien et la Pensée, qui forment le yod, la partie droite et mâle de Dieu, étaient seules ; la partie gauche et femelle, le , la Lumière n’avait pas encore été produite, et le vav, le Verbe, fils et trait d’union du yod et du , n’avait pas encore été engendré. C’est à cet enseignement que fait encore allusion le passage suivant[3] :

« Les mots : Seigneur mon Dieu (Jéhovah Élohi) désignent les deux degrés de l’essence divine qui constituent le commencement de la Foi et qui sont la base de l’unité et de l’indivisibilité du Monde au moment où il a été conçu dans la Pensée suprême et du Monde futur. Les mots : « Jéhovah Élohi, tu es très grand » désignent le commencement de la Foi, telle qu’elle était aux premiers jours et dans les jours anciens, c’est-à-dire aux époques diverses

  1. Zohar, III, fol. 292b ; t. VI, pp. 100-101.
  2. Zohar, III, fol. 292a ; t. VI, pp. 100.
  3. Zohar, II, fol. 98a ; t. III, pp. 394-395.