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LA KABBALE

enseigner. Nous les laisserons de côté pour nous en tenir aux passages, de signification moins problématique, que nous avons cités.


V
LES DEUX MONDES

La Lumière céleste, comme le Verbe, se manifeste en partie dans le Monde de la matière, mais, pour une part, elle lui demeure inaccessible. Aussi le Verbe a-t-il borné la matière par un firmament qu’elle ne peut franchir, au-delà duquel elle ne saurait s’élever pour s’imprégner de la Splendeur divine. Au-dessus du Firmament, le Zohar demeure, exempt de toute union avec la matière.

La divine Lumière, inaccessible à la matière, constitue, au gré des Kabbalistes, un premier Monde ; en compénétrant la matière, cette Lumière en fait un autre Monde.

Le Firmament se trouve être ainsi à la limite des deux Mondes ; au-dessus, s’étend un Monde supérieur immatériel, que le Zohar nomme souvent le Ciel, mais qu’en maintes circonstances, il a soin de distinguer des cieux visibles ; au-dessous, se trouve un Monde inférieur matériel que, parfois, le Zohar appelle la Terre.

Du Monde supérieur, la Sagesse divine, qui ne se révèle pas dans le Monde de la matière, est le Roi ; c’est Élohim, c’est-à-dire la Lumière, qui lui a servi d’architecte pour construire ce Monde ; avec son architecte, le Roi communiquait par le Verbe. Quant au Monde de la matière, Élohim, la Lueur, la Schekhina en est également l’architecte ; mais il a le Verbe pour Roi, car, avec la Sagesse, il ne saurait être directement en rapport. Tel est le sens de ce passage[1] que, déjà, nous avons cité :

« Le Roi, c’est la Sagesse supérieure d’en haut. Le Roi d’en bas, c’est la Colonne du milieu. Élohim est l’architecte céleste appelé la Mère d’en haut. Élohim est également 1’architecte d’en bas : et c’est lui qui est désigné par le nom de Schekbina d’en bas. »

Un autre passage exprime la même pensée.

Parfois, dans le divin tétragramme, le Zohar remplace le yod par un aleph ; de Jéhovah, le nom de Dieu se transforme en Ahavah.

  1. Zohar, I, fol. 22a ; t. I, p. 136.