Voilà donc pleinement mise en lumière la proposition d’Aristote : Les volumes que les éléments occupent dans le Monde sont inversement proportionnels aux densités de ces éléments. Des rapports qu’ont entre elles ces densités, savons-nous quelque chose ?
C’est d’une manière hypothétique et, comme disent les mathématiciens, pour fixer les idées, qu’Aristote a dit : Une mesure d’eau produit dix mesures d’air. C’est bien ainsi que Jean Philopon a compris la pensée du Stagirite. L’interjection : Mettons, φὲρε, dont il en fait précéder la formule nous en est un sûr garant. Mais d’autres commentateurs seront moins réservés ; ils prendront la phrase d’Aristote pour une affirmation catégorique.
Olympiodore, commentant le passage des Météores où le Stagirite attribue même masse à la sphère de l’eau et à l’atmosphère, écrit[1] : « Nous voyons (ὁρῶμεν) un cotyle d’eau se changer en dix cotyles d’air. » Il sera donc admis désormais que le volume occupé par l’air est décuple du volume occupé par l’eau.
Entre le volume de l’eau et le volume de la terre, pouvons-nous, de même, dire quel est le rapport ?
Au Timée, Platon supposait[2] qu’un même rapport existe entre la terre et l’eau, entre l’eau et l’air, entre l’air et le feu. Mais quelles propriétés fallait-il comparer entre elles pour reconnaître la constance de ce rapport ? Les Stoïciens et les Néoplatoniciens semblent avoir admis que la comparaison devait porter sur les densités
« Autant, écrit Ovide[3], le poids [spécifique] de l’eau est plus léger que le poids spécifique de la terre autant l’air est plus lourd que le feu
Imminet his aër qui, quanto est pondere terræ
Pondus aquæ levius, tanto est onerosior igni. »
« Autant, écrit à son tour Macrobe[4], il y a de différence entre l’eau et l’air par suite de la densité et de la gravité, autant il y en a entre l’air et l’eau, par suite de la rareté et de la légèreté, autant il y en a entre l’eau et la terre. »
- ↑ Olympiodori Philosophi Alexandrini In meteora Aristotelis commentarii… Camotio interprete. Venetiis, MDLI, fol. 5 ro. — Olympiodori In Aristotelis meteora commentaria. Edidit Guilelmus Stüve-Berolini, MCM ; p. 18.
- ↑ Voir : Première partie, ch. II, § I ; t. I, pp. 29-30.
- ↑ Ovide, Métamorphoses, livre I, vers 52-53.
- ↑ Ambrosii Theodosii Macrobii Commentariorum in Somnum Scipionis liber primus, cap. VI (Macrobius. Franciscus Eyssenhardt recognovit ; p. 491. Lipsiæ, 1868).