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LA PHYSIQUE PARISIENNE AU XIVe SIÈCLE

éprouvât aucune inclinaison ; c’est à ce point qu’il donnait le nom de centre de gravité ou d’inclinaison.

Archimède serait venu ensuite et, du point considéré par Poseidonios, point situé à la surface du corps et variable avec la position initiale du corps, il aurait distingué le point, unique et intérieur au corps, que nous nommons avec lui centre de gravité.

Le Περὶ ζυγῶν d’Archimède, comme beaucoup d’autres traités du grand géomètre, semble avoir été perdu de bonne heure. Pappus d’Alexandrie en prononce le nom ; mais tout indique qu’il ne l’avait pas lu, qu’il ne le connaissait que de réputation, sans doute par la lecture de Héron d’Alexandrie. Ce n’est donc pas d’Archimède, mais de Héron, à qui il a fait de si nombreux emprunts, qu’il tient ce qu’il dit touchant de la définition du centre de gravité.

Imaginons, écrit Pappus[1] qu’un corps grave soit suspendu par un axe αβ, et laissons-le prendre sa position d’équilibre. Le plan vertical passant par αβ « coupera le corps en deux parties équilibres, qui se tiendront en quelque sorte suspendues de part et d’autre du plan, étant égales entre elles par le poids. »

Prenons un autre axe αʹβʹ et répétons la même opération ; le nouveau plan vertical passant par le nouvel axe coupera sûrement le précédent ; s’il lui était parallèle, en effet, « chacun de ces deux plans diviserait le corps en deux parties qui seraient, à la fois, de poids égal et de poids inégal, ce qui est absurde. »

Suspendons maintenant le grave par un point γ et, lorsque le repos sera, établi, traçons la verticale γδ du point de suspension. Prenons ensuite un second point de suspension γʹ et, par une opération semblable, traçons une seconde droite γʹδʹ. Les deux droites γδ, γʹδʹ se couperont sûrement ; sinon, par chacune d’elles, on pourrait faire passer un plan coupant le corps en deux parties équilibres, de telle manière que ces deux plans soient parallèles entre eux, ce qu’on sait être impossible.

Toutes les lignes telles que γδ, γʹδʹ se couperont donc en un même point du corps, point qu’on nommera centre de gravité.

Dans ce raisonnement de Pappus comme dans les considérations de Héron, il est constamment question d’un plan qui partage un corps en deux parties équilibres ou équipondé-

  1. Pappi Alexandrini Collectiones quæ supersunt. Elibris manuscriptis edidit Fridericus Hultsch. Berolini, 1878. Lib. VIII, propos. I et II ; tomus III, p. 1301