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CHAPITRE XVI
L’ÉQUILIBRE DE LA TERRE ET DES MERS.
I. LES ANCIENNES THÉORIES

I
LE CENTRE DE GRAVITÉ DE LA TERRE ET LE CENTRE DU MONDE
SELON LES COMMENTATEURS HELLÈNES D’ARISTOTE

Le problème de l’équilibre de la terre et des mers est un de ceux auxquels la Physique parisienne du xive siècle consacrera le plus d’attention ; l’ingénieuse solution qu’elle en proposera sera tirée de principes que la Science a depuis longtemps rejetés ; mais, parmi les corollaires que ces principes lui permettront d’établir, il en est qui, pendant très longtemps, seront tenus pour vrais et qui exerceront la plus grande’influence soit sur les progrès de la Statique, soit sur les progrès de la Géologie ; il en est même qui, convenablement précisés, demeurent aujourd’hui au nombre des vérités que nous recevons comme certaines.

La théorie de l’équilibre de la terre et des mers doit donc être prise pour un des chapitres les plus importants de la Physique parisienne. Pour apprécier exactement l’apport de cette Physique à la théorie dont il s’agit, il importe de rappeler ce que la Physique hellène, puis la Physique arabe, enfin la Physique de la Chrétienté latine avaient dit, auparavant, du problème de l’équilibre de la terre et des mers.

Nous avons autrefois exposé[1] comment Aristote avait examiné et résolu une difficulté touchant le lieu que la terre occupe dans le Monde.

Chacune des parties de la terre est pesante, c’est-à-dire au gré du Stagirite, qu’elle a pour lieu naturel le centre du Monde ; placée au centre du Monde, elle y demeurerait d’elle-même en repos ; mise hors de ce point par l’effet de quelque violence,

  1. Première partie, ch. IV, § XIV ; tome I, pp. 215-216.