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LA PHYSIQUE PARISIENNE AU XIVe SIÈCLE

livres des Météores d’Aristote[1]. Cet écrit est précédé d’une étude composée par le R. P. Luc Wadding[2], et intitulée : De hoc Meteororum opuscule censura. Dans cette « censure », Wadding signale deux particularités bien propres à faire regarder comme apocryphes ces Questions sur les livres des Météores.

En premier lieu, l’auteur y donne[3] à Thomas d’Aquin le titre de bienheureux ; or Thomas d’Aquin ne fut canonisé que par Jean XXII, en 1323, tandis que Duns Scot est mort en 1308.

À cette première objection, Wadding indique une échappatoire possible ; le titre de beatus n’aurait pas voulu signifier que la canonisation de Thomas d’Aquin fût un fait accompli ; il serait seulement une marque de vénération donnée à l’illustre docteur dont la béatification future n’était douteuse pour personne.

En second lieu, l’écrit sur les Météores cite[4] le Tractatus de proportionibus de Thomas Bradwardin ; il remarque qu’en ce traité, Bradwardin a admis, le premier, que les épaisseurs des sphères des quatre éléments forment les termes successifs d’une progression géométrique. Or Bradwardin qui était, en 1325, procureur de l’Université d’Oxford, et qui mourut, en 1349, quarante et un ans après le Docteur Subtil, ne paraît pas avoir pu composer son Tractatus de proportionibus du vivant de ce ’ dernier.

Ici encore, Wadding signale une échappatoire ; Bradwardin aurait pu vivre jusqu’à un âge très avancé, et le Traité des proportions pourrait être une œuvre de sa jeunesse. Ce que vaut cette dernière échappatoire, il serait possible de le savoir, si nous découvrions un exemplaire daté du Tractatus de proportionibus.

Or, parmi les nombreuses copies de ce traité que possède la Bibliothèque Nationale, il s’en trouve qui sont datées.

1. R. P. F. Ioannis Duns Scott, Doctoris Subtilis, Ordinis Minorum, Meteorologicorum libri quatuor. Opus quod non antea lucem vidit, ex Anglia transmissum. — Le titre est suivi de cette recommandation adressée au relieur : Advertat compaeior librorum, hune Tractatum æquotardius ad nos delatum, ante Tomum III ponendum esse, ne erret. Or le tomus III des ïoannis Duns Scoti Opera omnia porte la mention suivante : Lugduni, Sumptibus Laurentii Durand, MDGXXXIX. — Dans la réimpression de cette édition, donnée à Paris, en 1891, ce traité se trouve au tome IV, p. 1-263.

2. Voir aussi ses Scriptores Ordinis Minorum, Rom», 1650, p. 203 ; Romæ, 1806, p. 138 ; Romæ, 1906, p. 137.

3. Op. laud., lib. I, quæst. X.

4. Op. laud., lib. I, quæst. XIII, art. III ; De proportion ? elçmentorunv

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